OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Les data en forme http://owni.fr/2012/10/01/les-data-en-forme-episode50/ http://owni.fr/2012/10/01/les-data-en-forme-episode50/#comments Mon, 01 Oct 2012 16:35:37 +0000 Paule d'Atha http://owni.fr/?p=121444 Data vedette

Le jury du concours Information is beautiful s’est réuni vendredi 28 septembre pour élire les meilleurs travaux de datajournalisme de l’année. Au milieu des milliers de participants, la palme d’or de la discipline a été décernée à l’application réalisée par l’agence américaine Stamen pour la chaîne CNN : Casualities, Home & Away.

Sur un fond de carte aux terres grises et aux mers noires, des loupiotes brillent en occident et sur les théâtres d’opération, Irak et Afghanistan, et se répondent. Ce sont les soldats envoyés sur le front, disparus au combat, là où ils ont perdu la vie et là d’où ils venaient. Des centaines, classés par âge, nationalité (ou état d’origine pour les Américains) et date de décès. Semés au fil des attentats et des attaques, de Kaboul à Bassorah, ils offrent un bilan glaçant des deux conflits dans cette confrontation des deux cartes.

Si cette carte vaut vraiment la peine d’être explorée, nous ne pouvons que vous inviter chaudement à passer en revue tous les autres nominés : que vous vous intéressiez au budget de l’Etat anglais ou à Metallica, il y en a pour tous les goûts et toutes les mirettes.


Mise en veille


Titre : El patron de los Numeros Primos (Les séquences des nombres premiers)
Source : JasonDavies.com
Auteur(s) : Jason Davies
Technique : D3.js
Note : Si vous êtes réfractaire aux maths, cette échelle des nombres premiers propose une représentation poétique bien que rigoureusement mathématique de cet ordre indivisible. Pour chaque valeur, ce graphique interactif trace une séquence de ses multiplicateurs qui serpente autour de l’axe des entiers, accompagné en pied de page de formules mathématiques se rapportant au nombre concerné. Repéré sur le site Data’N'Press inspiration, cette œuvre était accompagnée d’une autre représentation esthétiquement réussie mais un peu chaotique pour les rétifs à la géométrie, NumberSimulation.



Titre : Ville-Monde : Johannesburg
Source : France Culture
Auteur(s) : WeDoData
Technique : infographie
Note : Réalisé avec nos confrères datajournalistes de WeDoData, cette infographie décrit en quelques panneaux la ville de Johannesburg à l’occasion de la dernière édition de la revue hebdomadaire de France Culture, Ville Monde. Marquée par l’Apartheid dans son histoire, la métropole sud-africaine a conservé dans sa démographie et son économie les cicatrices de la séparation entre Noirs et Afrikaneers, décrite ici par quelques saisissantes statistiques.



Titre : Le dieci zavorre che pesano sul sistema-Paese (Les dix poids qui pèsent sur le système national)
Source : Il Sole 24 Ore
Auteur(s) : Il Sole 24 Ore
Technique : infographie
Note : Pour mettre en lumière les faiblesses qui plombent la compétitivité nationale, le quotidien économique italien Il Sole 24 Ore a épluché les statistiques des grandes organisations internationales pour y dénicher dix plaies. Du coût élevé du crédit à la qualité des infrastructures en passant par les factures de gaz et d’électricité, les datajournalistes ont situé l’Italie par rapport aux autres pays européens sur une échelle établie à partir des données de la BCE, de la Banque Mondiale ou du FMI, publiant ainsi une infographie riche en enseignement sur l’économie italienne mais aussi sur celle des autres états membres de l’UE.



Titre : What your beer says about your politics (Ce que votre bière révèle de vos opinions politiques)
Source : National Journal
Auteur(s) : Tracey Robinson, NMRPP / Mike Shannon et Will Feltus
Technique : infographie
Note : Mieux que la célèbre méthode de sondage politique “avec qui prendriez-vous une bonne bière ?”, deux journalistes du National Journal ont tenté de répondre à la question “dis-moi ce que tu descends, je te dirai pour qui tu votes”. En s’appuyant sur les 200 000 interivews de citoyens américains de l’étude sur les consommateurs de l’institut Scarborough, les deux journalistes ont ainsi réparti selon leur affiliation démocrate ou républicaine – ainsi que sur la stabilité de leur vote– , les habitués de chaque marque de bière recensée. On y apprend ainsi que les consommateurs de Heineken et de Corona sont les plus fervents démocrates tandis que les consommateurs de Corona Light ou de Samuel Adams penchent plutôt de l’autre côté.



Titre : The US electoral college explained : why we don’t vote directly for a president (Le collège électoral américain expliqué : pourquoi ne vote-t-on pas directement pour un président)
Source : Guardian
Auteur(s) : Guardian US Interactive team + Harry J Enten
Technique : datavidéo
Note : Essentiel à la compréhension de l’élection présidentielle américaine qui se profile, le fonctionnement du collège électoral reste une énigme pour les habitués du scrutin uninominal. Avec un fond vert et un texte (en anglais) bien calibré, Harry J. Enten du Guardian US déchiffre en graph (bien qu’avec peu d’entrain dans la voie) toutes les subtilités techniques qui amènent à l’élection d’un président ainsi que l’origine historique de cette étrange méthode.



Titre : Les enfants juifs de Paris déportés de juillet 1942 à août 1944
Source : ENS Lyon et CNRS
Auteur(s) : ENS Lyon, CNRS et Gérald Foliot (TGE Adonis).
Technique : Infrastructure Map Server
Note : En deux ans, d’un été à l’autre, 11 400 enfants juifs ont été arrêtés (6 200 à Paris), dont Serge Klarsfeld répertorie depuis 1978 les tragiques histoires. A l’aide de ces données, rapportées au cadastre de l’époque, les équipes de l’ENS Lyon et du CNRS ont constitué une carte de la capitale marquée des points représentant les rapts d’enfants juifs ayant pu être localisés. Un objet de mémoire qui fera l’objet d’une projection en 3D à l’occasion de la fête de la Science à l’ENS Lyon en octobre prochain.


BONUS : cartes au trésor

Titre : A handsome atlas (Un atlas de toute beauté)
Source : Brooklyn Brainery
Auteur(s) : Bureau du recensement du Ministère de l’Intérieur américain / Jonathan Soma
Technique : encre, peinture et papier.
Note : Le datajournalisme peut s’enorgueillir de talentueux ancêtres : en fouillant la librairie du Congrès, l’équipe de la Brooklyn Brainery a découvert des trésors de graphes, cartes et histogrammes produit pour certains il y a 150 ans ! Par un système de navigation élégant, le développeur Jonathan Soma ouvre à chacun les données collectées par le service de recensement dans les années 1870 à 1890, en camemberts peints à la main sur papiers jaunis par le temps.

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Les maths par Futurama http://owni.fr/2011/06/16/les-maths-par-futurama/ http://owni.fr/2011/06/16/les-maths-par-futurama/#comments Thu, 16 Jun 2011 09:55:21 +0000 El Jj http://owni.fr/?p=68095
Article publié sur OWNISciences sous le titre, L’équation Futurama


Le 23 juin prochain, Comedy Central lancera la deuxième partie de la sixième saison de Futurama, la petite sœur des Simpson, créée par Matt Groening et développée par David X. Cohen. La science est un sujet très présent chez les Simpson, mais c’est encore pire dans Futurama, où les clins d’œil à la physique, à l’informatique ou aux mathématiques sont légions, sans parler des références à la culture pop ! Il faut dire que, outre David X. Cohen, diplômé en physique de Harvard et en informatique de Berkeley, la série compte dans ses scénaristes Ken Keeler, diplômé en mathématiques appliquées de Harvard et Jeff Westbrook, diplômé en informatique à Princeton…

La série, diffusée de 1999 à 2003 sur la Fox, et depuis 2008 sur Comedy Central, narre les aventures de Fry, un livreur de pizza très moyen de la fin du XXe siècle, propulsé par erreur en l’an 2999…

Quelques clins d’œils à la physique (Le clone de Farnsworth) , à l'informatique (Le colocataire) ou à l'électronique (Proposition infinity). La géologie (L'enfer, c'est les autres robots) semble un peu moins appréciée...

Aujourd’hui, voici un panorama de tout ce que l’on peut trouver de mathématique dans Futurama ! (ça reste un blog mathématique !)

Nombres taxicab

Quand un nombre apparaît dans Futurama, c’est rarement un nombre choisi par hasard. Le nombre 1729, notamment, apparaît à de très nombreuses reprises :

Bender serait le 1729e robot de M'man (Conte de Noël), lors d'un épisode, l'équipe visite de nombreux univers parallèles, dont le n°1729 (Le bon, la boîte et l'ahuri) et le Nimbus, vaisseau commandé par Zapp Brannigan, a pour numéro BP-1729 (Le Monstre au milliard de tentacules)

Ce nombre est très célèbre pour être un nombre taxicab : un nombre qui peut être exprimé comme la somme de deux cubes, de plusieurs façons différentes (en l’occurrence, 2). En effet,

1729 = 13 + 123 = 93 + 103

Ces nombres sont surtout connus pour faire l’objet d’une anecdote impliquant Hardy et Ramanujan. Alors que le premier rendait visite au deuxième, malade, il lui annonça que le numéro de son taxi, 1729, était plutôt ennuyeux, et qu’il espérait que ce n’était pas un mauvais présage. Ramanujan lui dit que non, c’est un nombre tout à fait intéressant : il est exprimable comme la somme de deux cubes de deux façons distinctes !

Et à propos, le 3ème nombre Taxicab (exprimable comme somme de deux cubes de trois façons différentes) est 87539319 :

87539319 = 1673 + 4363 = 2283 + 4233 = 2553 + 4143

Qui, comme par hasard, apparaît -en petit- sur un taxi... (La grande aventure de Bender)

Il ne faut pas oublier que les numéros de série de Bender et de Flexo (les deux robots tordeurs) sont respectivement 2716057 = 9523 + (−951)3 et 3370318 =1193 + 1193, tous deux exprimables comme la somme de deux cubes. (Le genre de coïncidence qui font bien rire les deux robots lors de leur première rencontre). [Le moins pire des deux]

Aucun rapport : à la Central Bureaucracy, il existe une salle appelée Cubicle Room 729. On remarque tout de suite que 729 n’est autre que 93, et pour cause, la salle consiste en un cube 9×9x9 de bureaux en open-space.

(Lethal Inspection)

Nombres parfaits

Dans le registre des nombres qui ne sont pas là par hasard, il y a 6421.12 :

La facture de téléphone de Fry (Le Monstre au milliard de tentacules)

Si on fait le calcul, on s’aperçoit que Fry a appelé Dial-a-joke… 8128 fois ! (Soit 254 pages, avec 32 entrées par pages). Un nombre pas du tout aléatoire, puisque c’est un nombre parfait, un nombre égal à la somme de ses diviseurs propres. On note au passage que 8128=254*32 est sa factorisation par un nombre premier de Mersenne.

Irrationnels

A en croire la série, plus personne dans le futur n’aura de problèmes avec les nombres irrationnels…

√2 News, le rendez-vous information de Linda et Morbo de la chaîne √2 (Un gros tas d'ordures), la célèbre route √66 (Parasites perdus), la station de police de la √15e avenue (Astéroïque), et les dés de Mars Vegas (qui n'ont rien d'irrationnels, seulement le plaisir de mettre des radicaux) (Vous prendrez bien un dernier vert?)

De l'huile π-en-1 (Vol au-dessus d'un nid de robot); la πième avenue, qui arrive après la 2e et la 3e (Les actions du futur); le carton d'un supercollider de la marque πkéa (Astéroïque); π pour le prix de i, au milieu d'une dizaine d'autres spams sur l'écran d'Amy (La grande aventure de Bender), unique référence au nombre imaginaire i.

Et pour finir avec les références aux constantes mathématiques classique, le nombre e. Le vaisseau de Planet Express passe au travers de séquences de chiffres semblant aléatoires. Il s’agit en fait des décimales de e !

(Prenez garde au seigneur des robots !)

Infinis

L’infini mathématique est aussi source d’inspiration. Sous sa forme analytique, la proposition ∞ parodie la proposition 8 californienne du 2 mars 2008 interdisant le mariage homosexuel.

(Proposition infinity)

Mais surtout, l’infini apparaît dans le nom du cinéma de New New York : le Loew’s ℵ0-Plex. A en croire le nom, c’est un multiplexe qui aurait un nombre infini dénombrable de salles (ℵ0 désignant – à peu de choses près – le nombre d’élément de l’ensemble ℕ)

(Raging Bender)

Solides de Platon

Un des quatre épisode de la saison 4 met en scène la terrible M’man à la recherche de l’anticristal de matière noir, elle-même possédant déjà son cristal. A l’écran, le cristal (rouge) est en forme d’icosaèdre, et l’anticristal (noir) a celle d’un dodécaèdre, qui sont deux solides de Platon (un polyèdre dont toutes les faces sont un même polygone régulier). Mathématiquement, l’icosaèdre et le dodécaèdre sont duaux : on obtient l’autre en reliant le milieu des faces de l’un.

Dans ce même épisode, une scène montre les 3 autres polyèdres de Platon : le cube, le tétraèdre et l’octaèdre.

(Prenez garde au seigneur des robots !)

Il faut aussi parler de Madison Cube Garden, parodie du Madison Square Garden, un lieu récurrent de la série dans lequel se déroule les concerts ou les matchs de Blernsball. Sans surprise, il a la forme… d’un cube !

(Astéroïque)

Topologie

L’image scientifique la plus emblématique de la série reste la suivante :

(Le mal absolu)

Côte à côte, on peut voir de la liqueur de malt Olde Fortran (bière pour robot, en référence au langage de programmation Fortran), de la bière St Pauli Exclusion Principle Girl (référence croisée entre la bière St Pauli Girl et le principe d’exclusion de Pauli, en physique quantique) et surtout, de la bière de Klein, vendue dans des bouteilles de Klein (une surface mathématique ayant la particularité topologique de n’avoir ni intérieur, ni extérieur).

Dans la rubrique topologie, on peut aussi parler de l’épreuve de tordage des jeux olympiques, où un robot tord une poutre intordable en forme de nœud de trèfle (le nœud – au sens mathématique – le plus simple après le nœud trivial)

(L'homme est une femme formidable)

Grands théorèmes

On ne peut pas y échapper : la conjecture de Goldbach, l’hypothèse de Riemann ou la conjecture P=NP sont en l’an 3000 devenus de vrais théorèmes…

(Le Monstre au milliard de tentacules)

Une fois au paradis, Farnsworth et Wernstrom parviennent à démontrer la conjecture de Goldbach (qui dit que tout entier pair peut s’écrire sous la forme de la somme de deux nombres premiers). En détails, on peut lire sur le tableau :

GOLDBACH QUODLIBET (écrit en langage alien, signifiant littéralement en latin “n’importe quoi”)
n2+m < p1+p2 < (n+1)2+2m (une inégalité que l’on peut imaginer faire partie de la démonstration de Goldbach faisant intervenir la conjecture de Legendre (entre deux carrés, on trouve un nombre premier – à ce jour non démontrée) et le postulat de Bertrand (entre un entier et son double, on trouve un nombre premier))

3+5=8 (écrit de manière figurée, un exemple de nombre pair somme de deux premiers)

w’+z’→θ

η’+η’→2(η+ππ)

31, 314159 (les premiers nombres premiers que l’on peut obtenir en concaténant les décimales de pi)

π2(x) = 2c2 x/(ln(x))², x→∞

QED (“CQFD”) Nombre premier martien : ♂2 = 170141183460469231731687303715884105727 (un exemple de nombre premier de Mersenne 2p-1, où p est également un nombre premier de Mersenne)

etc…

Le problème P=NP (“un problème peut-il toujours être résolu rapidement par un algorithme ?“) fait une apparition au détour de deux livres dans le placard à balai des locaux de Planet Express.

Ne prêtez pas attention au fait que la tête de Fry est greffée sur le corps d'Amy, et regardez en bas à gauche. Un livre indique P, l'autre, NP (La tête sur l'épaule).

On peut aussi apercevoir l’hypothèse de Riemann (sous une forme démontrée) lors d’un cours sur les coniques :

(The Duh-Vinci Code)

Futurama parle également du théorème Greenwaldien, disant a²+b²>c² (l’homologue du théorème de Pythagore en géométrie sphérique). Il n’existe pas réellement de théorème Greenwaldien, c’est simplement un clin d’œil des scénaristes à Sarah Greenwald, qui a écrit plusieurs articles sur la science et les maths dans les Simspons et dans Futurama.

L’autre équation du tableau, E=9.87sin(2B)-7.53cos(B)-1.5sin(B), est l’équation du temps, utilisé en astronomie et qui mesure “la différence entre le temps solaire moyen et le temps solaire vrai“.

(La grande aventure de Bender)

Le théorème de Ken Keeler

Dans le dixième épisode de la saison 6, les scénaristes y sont allés encore plus fort : un théorème mathématique du domaine de la théorie des groupes, un vrai de vrai, a été inventé pour l’occasion, et sert de dénouement à l’intrigue !

Le professeur Farnsworth invente une machine permettant d’échanger deux esprits entre deux corps. Ainsi, l’esprit d’Amy se retrouve dans le corps de Farnsworth, et vice-versa. La premier soucis, c’est que si un échange est fait, il est impossible de revenir en arrière (Farnsworth et Amy ne peuvent plus échanger à nouveau leurs esprits). Le deuxième soucis, c’est que très vite, tous les personnages de la série utilisent la machine, et qu’une dizaine d’esprits sont dispersés dans tout autant de corps… Comment s’en sortir ?

(The Prisoner of Benda)

La solution est énoncée par les deux mathématiciens-basketteurs de la série, Sweet Clyde et Bubblegum Tate : en ajoutant seulement deux personnes, il est possible de remettre à leur place tous les esprits, quel que soit le nombre d’échanges ayant été faits. Et ils le prouvent :

Oui. Il s'agit bien de la preuve d'un théorème de la théorie des groupes. Entièrement rédigé. Dans une série du câble. (The Prisoner of Benda)

Le théorème montre que si le corps et l’esprit de k personnes sont mélangés, il suffit de deux autres personnes et de k+3 échanges (au plus) pour que chacun retrouve sa place initiale.

Avec l’aide des deux corps de Clyde et Tate, les 9 esprits mélangés parviennent à retrouver leur corps d’origine, en 13 échanges (dans le contexte de l’épisode, on peut montrer que le problème était résolu en 9 échanges, sans l’intervention de deux autres personnes).

Tout le reste

Il me reste encore plein d’images à mettre… Ca ne vous gêne pas si je les mets là, en désordre ?

11 est plus grand que 4. Cette vérité mathématique fait partie de l'ensemble de la connaissance humaine, rassemblée par les cerveaux avant de détruire l'Univers. (Fry : Le pourquoi du comment)

Bender lance une agence de rencontre : discrète (qui n'attire pas l'attention) et discrète (non continue). (La tête sur l'épaule)

∀xI♥x : une façon mathématique de dire qu'elle aime tout ce qui existe. (Le Monstre au milliard de tentacules)

Dans les tréfonds de l'Internet, toutes les perversions ont leur site, notamment, "Girls proving theorems". (Le mariage de Leela)

De nombreuses célébrités sont caricaturées dans Futurama. Entre autres : Euclide. (The Duh-Vinci Code)

Le nombre 0101100101 (357, en binaire), écrit en lettre de sang sur le mur, ne fait peur à personne. Le reflet dans le miroir est un peu plus effrayant : 1010011010 signifie 666 en binaire. (La voiture garoute)

Et il semble que la série ne va pas s’arrêter là. L’épisode prévu pour le 4 août prochain, intitulé “Möbius Dick“, parle d’une baleine de l’espace à 4 dimensions…

Sources :

Dr. Sarah’s Futurama Math: Mathematics in the Year 3000


Article initialement publié sur le blog “Chou Romanesco, vache qui rit et intégrales curvilignes” sous le titre “The Farnsworth Parabox”.

Photo Flickr CC PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales par repost.no.

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L’équation Futurama http://owni.fr/2011/06/14/lequation-futurama/ http://owni.fr/2011/06/14/lequation-futurama/#comments Tue, 14 Jun 2011 14:55:07 +0000 El Jj http://owni.fr/?p=35166 Le 23 juin prochain, Comedy Central lancera la deuxième partie de la sixième saison de Futurama, la petite sœur des Simpson, créée par Matt Groening et développée par David X. Cohen. La science est un sujet très présent chez les Simpson, mais c’est encore pire dans Futurama, où les clins d’œil à la physique, à l’informatique ou aux mathématiques sont légions, sans parler des références à la culture pop ! Il faut dire que, outre David X. Cohen, diplômé en physique de Harvard et en informatique de Berkeley, la série compte dans ses scénaristes Ken Keeler, diplômé en mathématiques appliquées de Harvard et Jeff Westbrook, diplômé en informatique à Princeton…

La série, diffusée de 1999 à 2003 sur la Fox, et depuis 2008 sur Comedy Central, narre les aventures de Fry, un livreur de pizza très moyen de la fin du XXe siècle, propulsé par erreur en l’an 2999…

Quelques clins d’œils à la physique (Le clone de Farnsworth) , à l'informatique (Le colocataire) ou à l'électronique (Proposition infinity). La géologie (L'enfer, c'est les autres robots) semble un peu moins appréciée...

Aujourd’hui, voici un panorama de tout ce que l’on peut trouver de mathématique dans Futurama ! (ça reste un blog mathématique !)

Nombres taxicab

Quand un nombre apparaît dans Futurama, c’est rarement un nombre choisi par hasard. Le nombre 1729, notamment, apparaît à de très nombreuses reprises :

Bender serait le 1729e robot de M'man (Conte de Noël), lors d'un épisode, l'équipe visite de nombreux univers parallèles, dont le n°1729 (Le bon, la boîte et l'ahuri) et le Nimbus, vaisseau commandé par Zapp Brannigan, a pour numéro BP-1729 (Le Monstre au milliard de tentacules)

Ce nombre est très célèbre pour être un nombre taxicab : un nombre qui peut être exprimé comme la somme de deux cubes, de plusieurs façons différentes (en l’occurrence, 2). En effet,

1729 = 13 + 123 = 93 + 103

Ces nombres sont surtout connus pour faire l’objet d’une anecdote impliquant Hardy et Ramanujan. Alors que le premier rendait visite au deuxième, malade, il lui annonça que le numéro de son taxi, 1729, était plutôt ennuyeux, et qu’il espérait que ce n’était pas un mauvais présage. Ramanujan lui dit que non, c’est un nombre tout à fait intéressant : il est exprimable comme la somme de deux cubes de deux façons distinctes !

Et à propos, le 3ème nombre Taxicab (exprimable comme somme de deux cubes de trois façons différentes) est 87539319 :

87539319 = 1673 + 4363 = 2283 + 4233 = 2553 + 4143

Qui, comme par hasard, apparaît -en petit- sur un taxi... (La grande aventure de Bender)

Il ne faut pas oublier que les numéros de série de Bender et de Flexo (les deux robots tordeurs) sont respectivement 3370318 (=95233 + (?951)3) et 2716057 (=1193 + 1193), tous deux exprimables comme la somme de deux cubes. (Le genre de coïncidence qui font bien rire les deux robots lors de leur première rencontre). [Le moins pire des deux]

Aucun rapport : à la Central Bureaucracy, il existe une salle appelée Cubicle Room 729. On remarque tout de suite que 729 n’est autre que 93, et pour cause, la salle consiste en un cube 9×9x9 de bureaux en open-space.

(Lethal Inspection)

Nombres parfaits

Dans le registre des nombres qui ne sont pas là par hasard, il y a 6421.12 :

La facture de téléphone de Fry (Le Monstre au milliard de tentacules)

Si on fait le calcul, on s’aperçoit que Fry a appelé Dial-a-joke… 8128 fois ! (Soit 254 pages, avec 32 entrées par pages). Un nombre pas du tout aléatoire, puisque c’est un nombre parfait, un nombre égal à la somme de ses diviseurs propres. On note au passage que 8128=254*32 est sa factorisation par un nombre premier de Mersenne.

Irrationnels

A en croire la série, plus personne dans le futur n’aura de problèmes avec les nombres irrationnels…

?2 News, le rendez-vous information de Linda et Morbo de la chaîne ?2 (Un gros tas d'ordures), la célèbre route ?66 (Parasites perdus), la station de police de la ?15e avenue (Astéroïque), et les dés de Mars Vegas (qui n'ont rien d'irrationnels, seulement le plaisir de mettre des radicaux) (Vous prendrez bien un dernier vert?)

De l'huile ?-en-1 (Vol au-dessus d'un nid de robot); la ?ième avenue, qui arrive après la 2e et la 3e (Les actions du futur); le carton d'un supercollider de la marque ?kéa (Astéroïque); ? pour le prix de i, au milieu d'une dizaine d'autres spams sur l'écran d'Amy (La grande aventure de Bender), unique référence au nombre imaginaire i.

Et pour finir avec les références aux constantes mathématiques classique, le nombre e. Le vaisseau de Planet Express passe au travers de séquences de chiffres semblant aléatoires. Il s’agit en fait des décimales de e !

(Prenez garde au seigneur des robots !)

Infinis

L’infini mathématique est aussi source d’inspiration. Sous sa forme analytique, la proposition ? parodie la proposition 8 californienne du 2 mars 2008 interdisant le mariage homosexuel.

(Proposition infinity)

Mais surtout, l’infini apparaît dans le nom du cinéma de New New York : le Loew’s ?0-Plex. A en croire le nom, c’est un multiplexe qui aurait un nombre infini dénombrable de salles (?0 désignant – à peu de choses près – le nombre d’élément de l’ensemble ?)

(Raging Bender)

Solides de Platon

Un des quatre épisode de la saison 4 met en scène la terrible M’man à la recherche de l’anticristal de matière noir, elle-même possédant déjà son cristal. A l’écran, le cristal (rouge) est en forme d’icosaèdre, et l’anticristal (noir) a celle d’un dodécaèdre, qui sont deux solides de Platon (un polyèdre dont toutes les faces sont un même polygone régulier). Mathématiquement, l’icosaèdre et le dodécaèdre sont duaux : on obtient l’autre en reliant le milieu des faces de l’un.

Dans ce même épisode, une scène montre les 3 autres polyèdres de Platon : le cube, le tétraèdre et l’octaèdre.

(Prenez garde au seigneur des robots !)

Il faut aussi parler de Madison Cube Garden, parodie du Madison Square Garden, un lieu récurrent de la série dans lequel se déroule les concerts ou les matchs de Blernsball. Sans surprise, il a la forme… d’un cube !

(Astéroïque)

Topologie

L’image scientifique la plus emblématique de la série reste la suivante :

(Le mal absolu)

Côte à côte, on peut voir de la liqueur de malt Olde Fortran (bière pour robot, en référence au langage de programmation Fortran), de la bière St Pauli Exclusion Principle Girl (référence croisée entre la bière St Pauli Girl et le principe d’exclusion de Pauli, en physique quantique) et surtout, de la bière de Klein, vendue dans des bouteilles de Klein (une surface mathématique ayant la particularité topologique de n’avoir ni intérieur, ni extérieur).

Dans la rubrique topologie, on peut aussi parler de l’épreuve de tordage des jeux olympiques, où un robot tord une poutre intordable en forme de nœud de trèfle (le nœud – au sens mathématique – le plus simple après le nœud trivial)

(L'homme est une femme formidable)

Grands théorèmes

On ne peut pas y échapper : la conjecture de Goldbach, l’hypothèse de Riemann ou la conjecture P=NP sont en l’an 3000 devenus de vrais théorèmes…

(Le Monstre au milliard de tentacules)

Une fois au paradis, Farnsworth et Wernstrom parviennent à démontrer la conjecture de Goldbach (qui dit que tout entier pair peut s’écrire sous la forme de la somme de deux nombres premiers). En détails, on peut lire sur le tableau :

GOLDBACH QUODLIBET (écrit en langage alien, signifiant littéralement en latin “n’importe quoi”)
n2+m < p1+p2 < (n+1)2+2m (une inégalité que l’on peut imaginer faire partie de la démonstration de Goldbach faisant intervenir la conjecture de Legendre (entre deux carrés, on trouve un nombre premier – à ce jour non démontrée) et le postulat de Bertrand (entre un entier et son double, on trouve un nombre premier))

3+5=8 (écrit de manière figurée, un exemple de nombre pair somme de deux premiers)

w’+z’??

?’+?’?2(?+??)

31, 314159 (les premiers nombres premiers que l’on peut obtenir en concaténant les décimales de pi)

?2(x) = 2c2 x/(ln(x))², x??

QED (“CQFD”) Nombre premier martien : ?2 = 170141183460469231731687303715884105727 (un exemple de nombre premier de Mersenne 2p-1, où p est également un nombre premier de Mersenne)

etc…

Le problème P=NP (“un problème peut-il toujours être résolu rapidement par un algorithme ?“) fait une apparition au détour de deux livres dans le placard à balai des locaux de Planet Express.

Ne prêtez pas attention au fait que la tête de Fry est greffée sur le corps d'Amy, et regardez en bas à gauche. Un livre indique P, l'autre, NP (La tête sur l'épaule).

On peut aussi apercevoir l’hypothèse de Riemann (sous une forme démontrée) lors d’un cours sur les coniques :

(The Duh-Vinci Code)

Futurama parle également du théorème Greenwaldien, disant a²+b²>c² (l’homologue du théorème de Pythagore en géométrie sphérique). Il n’existe pas réellement de théorème Greenwaldien, c’est simplement un clin d’œil des scénaristes à Sarah Greenwald, qui a écrit plusieurs articles sur la science et les maths dans les Simspons et dans Futurama.

L’autre équation du tableau, E=9.87sin(2B)-7.53cos(B)-1.5sin(B), est l’équation du temps, utilisé en astronomie et qui mesure “la différence entre le temps solaire moyen et le temps solaire vrai“.

(La grande aventure de Bender)

Le théorème de Ken Keeler

Dans le dixième épisode de la saison 6, les scénaristes y sont allés encore plus fort : un théorème mathématique du domaine de la théorie des groupes, un vrai de vrai, a été inventé pour l’occasion, et sert de dénouement à l’intrigue !

Le professeur Farnsworth invente une machine permettant d’échanger deux esprits entre deux corps. Ainsi, l’esprit d’Amy se retrouve dans le corps de Farnsworth, et vice-versa. La premier soucis, c’est que si un échange est fait, il est impossible de revenir en arrière (Farnsworth et Amy ne peuvent plus échanger à nouveau leurs esprits). Le deuxième soucis, c’est que très vite, tous les personnages de la série utilisent la machine, et qu’une dizaine d’esprits sont dispersés dans tout autant de corps… Comment s’en sortir ?

(The Prisoner of Benda)

La solution est énoncée par les deux mathématiciens-basketteurs de la série, Sweet Clyde et Bubblegum Tate : en ajoutant seulement deux personnes, il est possible de remettre à leur place tous les esprits, quel que soit le nombre d’échanges ayant été faits. Et ils le prouvent :

Oui. Il s'agit bien de la preuve d'un théorème de la théorie des groupes. Entièrement rédigé. Dans une série du câble. (The Prisoner of Benda)

Le théorème montre que si le corps et l’esprit de k personnes sont mélangés, il suffit de deux autres personnes et de k+3 échanges (au plus) pour que chacun retrouve sa place initiale.

Avec l’aide des deux corps de Clyde et Tate, les 9 esprits mélangés parviennent à retrouver leur corps d’origine, en 13 échanges (dans le contexte de l’épisode, on peut montrer que le problème était résolu en 9 échanges, sans l’intervention de deux autres personnes).

Tout le reste

Il me reste encore plein d’images à mettre… Ca ne vous gêne pas si je les mets là, en désordre ?

11 est plus grand que 4. Cette vérité mathématique fait partie de l'ensemble de la connaissance humaine, rassemblée par les cerveaux avant de détruire l'Univers. (Fry : Le pourquoi du comment)

Bender lance une agence de rencontre : discrète (qui n'attire pas l'attention) et discrète (non continue). (La tête sur l'épaule)

?xI?x : une façon mathématique de dire qu'elle aime tout ce qui existe. (Le Monstre au milliard de tentacules)

Dans les tréfonds de l'Internet, toutes les perversions ont leur site, notamment, "Girls proving theorems". (Le mariage de Leela)

De nombreuses célébrités sont caricaturées dans Futurama. Entre autres : Euclide. (The Duh-Vinci Code)

Le nombre 0101100101 (357, en binaire), écrit en lettre de sang sur le mur, ne fait peur à personne. Le reflet dans le miroir est un peu plus effrayant : 1010011010 signifie 666 en binaire. (La voiture garoute)

Et il semble que la série ne va pas s’arrêter là. L’épisode prévu pour le 4 août prochain, intitulé “Möbius Dick“, parle d’une baleine de l’espace à 4 dimensions…

Sources :

Dr. Sarah’s Futurama Math: Mathematics in the Year 3000


Article initialement publié sur le blog “Chou Romanesco, vache qui rit et intégrales curvilignes” sous le titre “The Farnsworth Parabox”.

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L’humain, moins bon en probabilités que les pigeons? http://owni.fr/2011/05/21/lhumain-moins-bon-en-probabilites-que-les-pigeons/ http://owni.fr/2011/05/21/lhumain-moins-bon-en-probabilites-que-les-pigeons/#comments Sat, 21 May 2011 08:27:38 +0000 xochipilli http://owni.fr/?p=63777 Vous souvenez-vous du paradoxe de Monty Hall, dont je vous avais parlé dans ce billet ? Il s’agit d’un jeu imaginaire où vous essayez de gagner un cadeau, caché derrière une seule des trois portes fermées se trouvant devant vous. Dès que vous avez choisi une porte, l’animateur du jeu -qui sait où est la bonne porte- vous indique une porte “perdante” parmi celles que vous n’avez pas choisies et, bon prince, il vous laisse la possibilité de modifier votre choix. Le feriez-vous ? La majorité des gens préfère maintenir leur choix initial au motif qu’ils ont l’impression que, de toute façon, ils ont une chance sur deux de gagner. En réalité, ils auraient deux fois plus de chance de gagner s’ils modifiaient leur choix (si vous n’êtes pas convaincus, faites le test vous-même sur ce site).

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le  paradoxe de Monty Hall expliqué dans le film “21″ [en]

J’ai découvert dans l’excellent blog de Sciences Etonnantes que l’on a fait passer à des pigeons un test similaire avec des boîtes opaques dont l’une seulement contient de la nourriture. Et  là, surprise : à force de répéter le jeu, les pigeons finissent par piger le truc et adoptent à 96% la bonne stratégie, alors que, dans la même situation, un tiers des humains ne démordent pas de leur choix initial. Mais après tout, le pigeon n’est-il pas un peu girouette par nature ? Pour valider ou écarter cette explication phylogénétique (quoique je ne sois pas bien sûr de la classification exacte des girouettes), les auteurs ont testé une variante où la meilleure stratégie consiste à ne pas changer d’avis. Et là encore les pigeons sont meilleurs que nous. Quelle honte ! Je suppose que notre contre-performance s’explique par le fait que l’on choisit une stratégie a priori, alors que les pigeons se laissent juste guider par l’expérience. Or, on rechigne naturellement à remettre en cause la stratégie qu’on a choisie, même si l’expérience montre qu’on aurait intérêt à le faire. Nous finissons par être prisonniers de nos préjugés, en quelque sorte, malgré l’évidence.

L’aversion au gaspillage : une irrationalité bien humaine

Il me semble qu’on a affaire ici à un biais très comparable au sunk cost effect (effet des “fonds perdus”, cf ce billet). Si vous achetez un billet pour un concert ou une place de théâtre, le soir venu vous vous sentez obligé d’y aller, même si vous n’en avez plus du tout envie et qu’en plus le spectacle est retransmis à la télé. Vous êtes réticent à l’idée d’avoir dépensé inutilement votre argent alors que l’argent dépensé est de toute façon perdu, que vous alliez ou non au spectacle. La seule décision rationnelle consisterait à rester chez vous si ça vous chante et tant pis pour le billet perdu.

C’est évidemment plus facile à dire qu’à faire, mais les animaux et les jeunes enfants ne connaissent pas ce genre d’atermoiements. Comme pour les pigeons de l’expérience précédente, ils choisissent la stratégie qui sur l’instant leur semble la plus pertinente, même lorsqu’elle contredit leurs décisions ou leurs investissements antérieurs. Il n’y a que nous, pauvres humains, qui ayons des états d’âme à renier nos décisions passées. C’est un classique de la psychologie. Certes on choisit ce qu’on croit être la meilleure solution mais nos choix construisent en retour notre identité et l’on se définit en fin de compte par l’ensemble des décisions que l’on a prises. C’est ainsi qu’on a tendance à considérer nos choix passés comme les meilleurs possibles, non pas parce qu’ils le sont mais du seul fait qu’on les a décidés. Si l’expérience montre l’inverse, la dissonance cognitive qui en résulte nous embarrasse et on est tenté de faire la sourde oreille. L’irrationalité naîtrait ainsi (je mets un conditionnel quand même, tout ça n’est que pure spéculation !) du conflit entre réalisme et estime de soi. Chez les animaux, il n’y a pas de construction d’ego qui tienne donc pas de dissonance cognitive et finalement aucun scrupule à renier ses choix ou ses stratégies antérieures. Il me semble donc naturel qu’ils ne soient sujet ni au sunk cost effect, ni à la psycho-rigidité dans un jeu à la Monty Hall.

Biais cognitifs universels ?

Mais bon, dans bien des cas, nos amis les bêtes sont tout aussi irrationnelles que nous. Rien de tel qu’un petit tour au rayon céréales ou yaourts d’un hypermarché, là où l’on peut rester hagard devant tant de choix. Vous hésitez entre les Bio-super-top (A) à 6€ et les Low-sugar-double-plus (B) à 3€ seulement? Si à ce moment là on vous présente des Bio-beurk (A’) à 8€ (donc plus chers et moins bons que A) normalement ça ne devrait rien changer à votre (in)décision. Et pourtant il y a toutes les chances qu’un tel repoussoir vous incite à choisir des Bio-super-top (A), du seul fait qu’ils supportent mieux la comparaison avec les Bio-Beurks. Ce phénomène de “faire-valoir” semble universel chez les humains et de nombreuses expériences ont été montées pour savoir si les animaux y étaient sujets. On a par exemple mesuré chez des abeilles et chez des geais leurs préférences entre deux dispositifs :

Les chercheurs ont trouvé le même biais chez bien d’autres animaux. Grâce à un dispositif astucieux ils ont même réussi à tester Physarum polycephalum, une espèce d’amibe collective, sorte de slime jaunâtre pas très ragoutant auquel ils proposaient de choisir entre plusieurs plats différents. Les graphiques sont exactement les mêmes que les précédents, alors que Physarum polymachin n’a ni cerveau ni système nerveux central ! Peut-être touche-t-on là une limite structurelle de nos systèmes biologiques ? C’est ce que me suggérait récemment Etienne Koechlin. De la même manière qu’on ne peut faire plus de deux tâches conscientes en même temps, notre système neuronal ne pourrait comparer plus de deux choses à la fois. Un peu comme le fléau d’une balance en quelque sorte.

Fortiche les fourmis !

Pour tester cette hypothèse, des chercheurs sont allés chercher un truc vivant dont les prises de décisions ne dépendraient pas d’un système nerveux classique. Ils ont réussi à faire passer le test de “faire-valoir” à des colonies de fourmis. On sait que les fourmis préfèrent les nids protégés de la lumière et dont l’entrée est petite (donc plus facile à garder). Ils les ont donc forcées à choisir entre un nid à petite entrée mais exposé à la lumière (A) ou bien un nid obscur mais avec une entrée large (B). Puis ils ont observé l’effet d’un troisième choix servant de faire-valoir soit à A (DA) soit à B (DB). Et là miracle…

Pour une fois, les fourmis ne semblent pas perturbées dans leurs décisions par des options supplémentaires non pertinentes. Elles sont les seules qui ne sont pas sensibles au biais de “faire-valoir”. Pour cette épreuve, le système de décision collective des fourmis surpasse donc tous les systèmes de décision individuelle, le nôtre compris ! Un bel exemple de “sagesse des foules”, je trouve, qui pourrait expliquer l’extraordinaire succès évolutif des espèces les plus sociales (hommes, insectes, bactéries, rongeurs…)

Sources :
Arkes & Ayton:The Sunk cost and Concorde Effect (1999)
Shafir, Waite & Smith, Context dependent violations in honeybees and jays (2002)
Latty & Beekman: Irrational decision-making in an amoeboid organism (2010)

Billets connexes :
Les fantaisies de Homo Economicus (2): pour plus d’exemples de sunk cost effect et le numéro 3 sur la difficulté de choisir entre trop d’options
Etrange perspicacité collective sur la sagesse des foules
Un peu de gymnastique mentale sur le paradoxe de Monty Hall

>> Article initialement publié sur le Webinet des curiosités

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Article publié initialement sur OWNIsciences.

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L’humain, moins bon en probabilités que les pigeons? http://owni.fr/2011/05/04/humain-maths-probabilites-pigeons-animaux/ http://owni.fr/2011/05/04/humain-maths-probabilites-pigeons-animaux/#comments Wed, 04 May 2011 06:49:12 +0000 xochipilli http://owni.fr/?p=34766 Vous souvenez-vous du paradoxe de Monty Hall, dont je vous avais parlé dans ce billet ? Il s’agit d’un jeu imaginaire où vous essayez de gagner un cadeau, caché derrière une seule des trois portes fermées se trouvant devant vous. Dès que vous avez choisi une porte, l’animateur du jeu -qui sait où est la bonne porte- vous indique une porte “perdante” parmi celles que vous n’avez pas choisies et, bon prince, il vous laisse la possibilité de modifier votre choix. Le feriez-vous ? La majorité des gens préfère maintenir leur choix initial au motif qu’ils ont l’impression que, de toute façon, ils ont une chance sur deux de gagner. En réalité, ils auraient deux fois plus de chance de gagner s’ils modifiaient leur choix (si vous n’êtes pas convaincus, faites le test vous-même sur ce site).

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le  paradoxe de Monty Hall expliqué dans le film “21″ [en]

J’ai découvert dans l’excellent blog de Sciences Etonnantes que l’on a fait passer à des pigeons un test similaire avec des boîtes opaques dont l’une seulement contient de la nourriture. Et  là, surprise : à force de répéter le jeu, les pigeons finissent par piger le truc et adoptent à 96% la bonne stratégie, alors que, dans la même situation, un tiers des humains ne démordent pas de leur choix initial. Mais après tout, le pigeon n’est-il pas un peu girouette par nature ? Pour valider ou écarter cette explication phylogénétique (quoique je ne sois pas bien sûr de la classification exacte des girouettes), les auteurs ont testé une variante où la meilleure stratégie consiste à ne pas changer d’avis. Et là encore les pigeons sont meilleurs que nous. Quelle honte ! Je suppose que notre contre-performance s’explique par le fait que l’on choisit une stratégie a priori, alors que les pigeons se laissent juste guider par l’expérience. Or, on rechigne naturellement à remettre en cause la stratégie qu’on a choisie, même si l’expérience montre qu’on aurait intérêt à le faire. Nous finissons par être prisonniers de nos préjugés, en quelque sorte, malgré l’évidence.

L’aversion au gaspillage : une irrationalité bien humaine

Il me semble qu’on a affaire ici à un biais très comparable au sunk cost effect (effet des “fonds perdus”, cf ce billet). Si vous achetez un billet pour un concert ou une place de théâtre, le soir venu vous vous sentez obligé d’y aller, même si vous n’en avez plus du tout envie et qu’en plus le spectacle est retransmis à la télé. Vous êtes réticent à l’idée d’avoir dépensé inutilement votre argent alors que l’argent dépensé est de toute façon perdu, que vous alliez ou non au spectacle. La seule décision rationnelle consisterait à rester chez vous si ça vous chante et tant pis pour le billet perdu.

C’est évidemment plus facile à dire qu’à faire, mais les animaux et les jeunes enfants ne connaissent pas ce genre d’atermoiements. Comme pour les pigeons de l’expérience précédente, ils choisissent la stratégie qui sur l’instant leur semble la plus pertinente, même lorsqu’elle contredit leurs décisions ou leurs investissements antérieurs. Il n’y a que nous, pauvres humains, qui ayons des états d’âme à renier nos décisions passées. C’est un classique de la psychologie. Certes on choisit ce qu’on croit être la meilleure solution mais nos choix construisent en retour notre identité et l’on se définit en fin de compte par l’ensemble des décisions que l’on a prises. C’est ainsi qu’on a tendance à considérer nos choix passés comme les meilleurs possibles, non pas parce qu’ils le sont mais du seul fait qu’on les a décidés. Si l’expérience montre l’inverse, la dissonance cognitive qui en résulte nous embarrasse et on est tenté de faire la sourde oreille. L’irrationalité naîtrait ainsi (je mets un conditionnel quand même, tout ça n’est que pure spéculation !) du conflit entre réalisme et estime de soi. Chez les animaux, il n’y a pas de construction d’ego qui tienne donc pas de dissonance cognitive et finalement aucun scrupule à renier ses choix ou ses stratégies antérieures. Il me semble donc naturel qu’ils ne soient sujet ni au sunk cost effect, ni à la psycho-rigidité dans un jeu à la Monty Hall.

Biais cognitifs universels ?

Mais bon, dans bien des cas, nos amis les bêtes sont tout aussi irrationnelles que nous. Rien de tel qu’un petit tour au rayon céréales ou yaourts d’un hypermarché, là où l’on peut rester hagard devant tant de choix. Vous hésitez entre les Bio-super-top (A) à 6€ et les Low-sugar-double-plus (B) à 3€ seulement? Si à ce moment là on vous présente des Bio-beurk (A’) à 8€ (donc plus chers et moins bons que A) normalement ça ne devrait rien changer à votre (in)décision. Et pourtant il y a toutes les chances qu’un tel repoussoir vous incite à choisir des Bio-super-top (A), du seul fait qu’ils supportent mieux la comparaison avec les Bio-Beurks. Ce phénomène de “faire-valoir” semble universel chez les humains et de nombreuses expériences ont été montées pour savoir si les animaux y étaient sujets. On a par exemple mesuré chez des abeilles et chez des geais leurs préférences entre deux dispositifs :

Les chercheurs ont trouvé le même biais chez bien d’autres animaux. Grâce à un dispositif astucieux ils ont même réussi à tester Physarum polycephalum, une espèce d’amibe collective, sorte de slime jaunâtre pas très ragoutant auquel ils proposaient de choisir entre plusieurs plats différents. Les graphiques sont exactement les mêmes que les précédents, alors que Physarum polymachin n’a ni cerveau ni système nerveux central ! Peut-être touche-t-on là une limite structurelle de nos systèmes biologiques ? C’est ce que me suggérait récemment Etienne Koechlin. De la même manière qu’on ne peut faire plus de deux tâches conscientes en même temps, notre système neuronal ne pourrait comparer plus de deux choses à la fois. Un peu comme le fléau d’une balance en quelque sorte.

Fortiche les fourmis !

Pour tester cette hypothèse, des chercheurs sont allés chercher un truc vivant dont les prises de décisions ne dépendraient pas d’un système nerveux classique. Ils ont réussi à faire passer le test de “faire-valoir” à des colonies de fourmis. On sait que les fourmis préfèrent les nids protégés de la lumière et dont l’entrée est petite (donc plus facile à garder). Ils les ont donc forcées à choisir entre un nid à petite entrée mais exposé à la lumière (A) ou bien un nid obscur mais avec une entrée large (B). Puis ils ont observé l’effet d’un troisième choix servant de faire-valoir soit à A (DA) soit à B (DB). Et là miracle…

Pour une fois, les fourmis ne semblent pas perturbées dans leurs décisions par des options supplémentaires non pertinentes. Elles sont les seules qui ne sont pas sensibles au biais de “faire-valoir”. Pour cette épreuve, le système de décision collective des fourmis surpasse donc tous les systèmes de décision individuelle, le nôtre compris ! Un bel exemple de “sagesse des foules”, je trouve, qui pourrait expliquer l’extraordinaire succès évolutif des espèces les plus sociales (hommes, insectes, bactéries, rongeurs…)

Sources :
Arkes & Ayton:The Sunk cost and Concorde Effect (1999)
Shafir, Waite & Smith, Context dependent violations in honeybees and jays (2002)
Latty & Beekman: Irrational decision-making in an amoeboid organism (2010)

Billets connexes :
Les fantaisies de Homo Economicus (2): pour plus d’exemples de sunk cost effect et le numéro 3 sur la difficulté de choisir entre trop d’options
Etrange perspicacité collective sur la sagesse des foules
Un peu de gymnastique mentale sur le paradoxe de Monty Hall

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http://owni.fr/2011/05/04/humain-maths-probabilites-pigeons-animaux/feed/ 3
La spirale du y?n-yáng décryptée http://owni.fr/2011/05/03/la-spirale-du-yin-yang-decryptee/ http://owni.fr/2011/05/03/la-spirale-du-yin-yang-decryptee/#comments Tue, 03 May 2011 07:51:44 +0000 El Jj http://owni.fr/?p=34733 YY_Fermat

Le tàijí tú : symbole de la dualité y?n-yáng

A quoi ressemble exactement la frontière entre le bien et le mal ? Qu’est ce qui sépare fondamentalement le froid du chaud ? Comment distinguer le sombre de la clarté ? Seuls trois mathématiciens chevronnés pouvaient s’attaquer à la résolution de ces mystères. Leur réponse est sans appel : c’est la spirale de Fermat !

Les taoïstes me contrediront sûrement, mais le yin et le yang, c’est ce qui décrit comment les forces contraires de la nature sont interconnectées et interdépendantes. Elles apparaissent dans les écrits de Lao Tseu, au chapitre 42 du Tao Tö King. Sans doute par goût esthétique, Zhu Xi a popularisé le Taijitu, la représentation graphique bien connue du yin et du yang.

Oui, mais… Comment représenter au mieux ce Taijitu ? Quelle est la courbe qui sépare au mieux le yin du yang ? C’est la question que se sont posée Taras Banakh, Oleg Verbitsky et Yaroslav Vorobets (deux mathématiciens Ukrainiens et un Américain), avant de trouver une réponse en 2009.

YYs

Qui sera le meilleur yin-yang ?

Mais de quoi on parle ?

Il s’agit donc de trouver une courbe ? (la courbe qui ressemble à un S) qui sépare le yin du yang de la manière la plus harmonieuse possible. Que doit-on attendre d’elle ? Les trois mathématiciens proposent 6 hypothèses, mêlant des arguments esthétiques et philosophiques.

A1 : ? sépare D en deux parties identiques, D étant un disque d’aire 1 (ie., de rayon 1/??)
Il ne faudrait quand même pas que le yin soit plus fort que le yang !

A2 : ? traverse tout cercle concentrique à D exactement deux fois
Là, c’est par soucis d’esthétisme (ce qui oblige, au passage, ? à passer par le centre du disque).

A3 : Tout rayon de D coupe ? exactement une fois (ou 2, si on compte le centre)
C’est une hypothèse un peu plus discutable, mais c’est philosophiquement intéressant : tout rayon a une partie yin et une partie yang.

A5 : ? est une courbe lisse
Déjà, parce que c’est plus joli comme ça, et surtout, ça évite tout un tas de cas dégénérés (Et personne ne voudrait d’un Taijitu dégénéré).

A6 : ? possède des coordonnées polaires algébriques
Qui voudrait d’une frontière irrationnelle entre le yin et le yang ? L’équation de la courbe ne devra faire intervenir que des polynômes.

Avec ces 5 hypothèses, tout une famille de courbes se dégage : les spirales. Mais laquelle choisir : D’Archimède ? De Fermat ? D’or ? Logarithmique ?

L’hypothèse de la symétrie

Il faut donc une dernière hypothèse, assurant un équilibre entre symétrie et asymétrie.

A4 : ? sépare D en deux ensembles parfaits
C’est la moindre des choses que le yin et le yang soient parfaits…

On va appeler “symétrique” un sous-ensemble B du disque qui est sa propre image par une symétrie d’axe un diamètre du disque. On peut “symétriser” un ensemble quelconque en prenant son intersection avec son image.

YYsymetries
L’ensemble délimité par la courbe rouge est symétrique (dans le sens de l’article), contrairement à celui délimité par la courbe verte.
En intersectant l’ellipse bleu clair avec son image, on trouve un sous-ensemble (bleu foncé) symétrique.

On dit alors qu’un sous-ensemble A de D est parfait si son aire vaut 1/2 et que tout sous-ensemble symétrique de A a une aire d’au plus 1/4.

Non seulement, il existe des ensembles parfaits (c’est la moindre des choses), mais surtout, cette propriété possède un corollaire particulièrement intéressant : l’intersection entre un ensemble parfait et son symétrique par rapport à une droite a une aire valant toujours 1/4 (l’aire du symétrisé vaut la moitié de celle de l’ensemble parfait).

YYparfait
L’ensemble en rouge est parfait : l’aire de son sous-ensemble symétrisé (en violet) par rapport au diamètre vertical vaut la moitié de l’ensemble rouge. Un applet est disponible là-bas, pour faire tourner le diamètre.

L’hypothèse prend donc tout son sens : en demandant au yin (resp. le yang) d’être un ensemble parfait, on demande lui demande de posséder une dualité parfaite symétrie/asymétrie, et ce, dans tous les sens possibles. On ne peut pas mettre plus de dualité !

La courbe du Taijitu est donc…

La spirale de Fermat, d’équation polaire ?²r²=? ! ou, d’équation cartésienne [±?(t/?²).cos(t), ±?(t/?²).sin(t)]. Et c’est la seule courbe (à une rotation près) qui vérifie les 6 hypothèses. Telle est la conclusion Banakh, Verbitsky et Vorobets.

YYspiraleFermat
La spirale de Fermat. En prenant un cercle plus ou moins grand, on trouve plusieurs types de Taijitu.

Le coefficient ?², c’est juste pour respecter l’hypothèse A3. En modifiant ce coefficient, on peut faire spiraler plus ou moins le Taijitu, et, par exemple, faire en sorte que chaque rayon coupe ? exactement deux fois.

Et en vrai ?

Le symbole du yin-yang apparaît dans le drapeau sud-coréen, et donc, a déjà été normalisé. Plutôt qu’une spirale de Fermat, le choix s’est porté sur deux demi-cercles de rayon 1/2. Au moins, la courbe et le bord du cercle sont tangents.

YYcds
Les dimensions normalisées du drapeau de la Corée du Sud.

En remontant dans l’histoire des drapeaux du pays, on retrouve celui de 1882, featuring… une spirale de Fermat !

YYcds1882
L’ancien drapeau de la Corée du Sud


Sources :
Le Yin et le Yang sur Images des mathématiques, article duquel je me suis (très) grandement inspiré.
Fermat’s spiral and the line between Yin and Yang, l’article original de Banakh, Verbitsky et Vorobets.

>> Photo FlickR CC AttributionNoncommercialNo Derivative Works Laurence & Annie

>> Article initialement publié sur Choux Romanesco, vache qui rit et intégrales curvilignes , un blog de C@fé des sciences

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http://owni.fr/2011/05/03/la-spirale-du-yin-yang-decryptee/feed/ 2
La randonnée du carré http://owni.fr/2011/03/23/la-randonnee-du-carre/ http://owni.fr/2011/03/23/la-randonnee-du-carre/#comments Wed, 23 Mar 2011 16:59:33 +0000 El Jj http://owni.fr/?p=34426 Au hasard de pérégrinations dans la webosphère mathématique, on tombe parfois sur de jolis problèmes dont l’énoncé pourtant simple amène à des difficultés insoupçonnées. Un problème de ce genre est d’autant plus beau qu’il est parfaitement anecdotique, sans applications pour encore longtemps et toujours au rang de conjecture ! Le genre de théorème suffisamment riche pour avoir un article à son nom sur le blog. Un bon exemple : la conjecture de Toeplitz (aka le théorème de Stromquist ou problème du carré inscrit).

Tous les ingrédients sont là :
- un problème simple à mi-chemin entre géométrie et topologie (autrement dit, avec des dessins)
- une période de 78 ans entre le moment où Otto Toeplitz énonce sa conjecture (1911) et le moment où Walter Stromquist publie une solution intéressante (1989).
- de chouettes variantes

Le problème du carré inscrit

Puisque le problème parle de courbe, il va falloir se munir d’un crayon et d’une feuille de papier. Dessinez-y une courbe qui revient à son point de départ, mais qui ne passe jamais deux fois au même endroit (c’est ce qu’on appelle une courbe de Jordan, qui partage le plan en un intérieur et un extérieur). Maintenant, le jeu est de trouver quatre points de la courbe qui forment un carré. Si tout va bien, vous devriez trouver. Sinon, c’est que vous avez mal cherché, ou que vous êtes tombé sur un contre-exemple (mais je miserais plutôt sur le fait que vous avez mal cherché)

Deux_carres_inscrits
Exemple de courbe de Jordan possédant (au moins) deux carrés inscrits

Soyons précis dans les termes : une courbe de Jordan, c’est donc une courbe fermée sans point double. On dit qu’un polygone est inscrit dans la courbe si ses sommets tombent sur la courbe en question. La conjecture de Toeplitz demande donc :

Une courbe de Jordan admet-elle toujours un carré inscrit ?

On peut s’attendre à plusieurs réponses :

- Toutes ? Oui, sans exception !
- Toutes ?  Non ! Mais la probabilité de trouver un contre-exemple en tirant au hasard dans l’ensemble des courbe est nulle.
- Toutes ? Loin de là ! La probabilité de trouver une courbe admettant un carré inscrit est nulle.
- Toutes ? N’importe quoi ! Aucune, plutôt !

Étant donné qu’il existe au moins un exemple, on peut oublier la dernière réponse, mais dans l’état actuel des choses, on ne sait pas trancher entre les trois réponses possibles : on ne sait pas à quel point il existe des contre-exemples… Cela dit, un théorème particulièrement intéressant fait le buzz en 1989 : le théorème de Stromquist, qui répond à la conjecture de Toeplitz en disant :

Oui.

Ou, pour être plus précis, la courbe possède son carré inscrit si elle est suffisamment sympathique (dans le sens où elle ne doit pas avoir de comportement fractal). Le problème, c’est que l’ensemble des courbes sympathique ne représente qu’une infime partie de l’ensemble des courbes. Ce théorème répond quand même un peu au problème de départ, puisque si on dessine vraiment notre courbe sur un bout de papier, elle sera “suffisamment sympathique”. Ce théorème répond donc à 99% à la question posée, mais le 1% demande encore beaucoup de travail…

Ou pourrais aussi penser à approcher une courbe quelconque par une suite de courbe sympathique en prenant à chaque fois le carré donné par le théorème de Stromquist, mais on n’est pas sûr d’obtenir un carré de côté non nul après le passage à la limite (et si on autorise ce genre de carré, la question n’a plus trop d’intérêt…)

Bref, ce problème est difficile, et fait appel à des considérations sophistiquées… Mais les variantes du problèmes sont bien plus faciles à résoudre, et demandent des solutions ingénieuses ! Voici donc ce qu’il se passe quand on considère les courbes symétriques, ou quand on cherche des parallélogrammes, des losanges ou des triangles inscrits.

Le problème du carré inscrit – dans une courbe symétrique

Comme le problème est difficile dans sa généralité, autant regarder un cas particulier. Le plus simple, c’est celui où la courbe J possède une symétrie centrale.

Stromquist_sym
5 Carrés inscrits se cachent dans cette courbe de Jordan symétrique. Saurez-vous les débusquer ?

En deux coups de cuillère à pot, on peut trouver ses carrés inscrit. L’idée est de considérer la même figure après une rotation à 90° (R). Les deux courbes se coupent alors en au moins un point, disons P. Dans ce cas, les points P, -P, R(P) et -R(P) sont aussi sur la courbe en question, et forme un carré. CQFD !

Stromquist_sym2

(En fait, non, il faut aussi montrer que les deux courbes se croisent bien quelque part. L’idée est de prendre deux points particuliers sur J – le plus proche et le plus éloigné du centre – et de montrer que leur image par R sont respectivement à l’intérieur et à l’extérieur du domaine délimité par J)

Le problème du carré losange inscrit

Changeons. Au lieu de chercher un carré, et si on cherchait plutôt un losange ? Ou un parallélogramme ? Nielson montre en 1995 qu’il existe toujours une infinité de losanges inscrits dans une courbe de Jordan, et il utilise pour cela une technique de preuve révolutionnaire : la preuve par “petits bonhomme qui gravissent une montagne” !

Notre courbe, on peut considérer que c’est un gros rocher posé en équilibre sur un sol horizontal. Quitte à faire basculer un peu le rocher, on peut supposer qu’il possède un seul sommet et qu’un seul point qui touche le sol. On considère donc 4 alpinistes : A, B, C et D. A et B partiront du sommet S du rocher et  descendront en rappel, chacun de son côté du rocher. C et D, quant à eux, partiront de la base M du rocher, et grimperont.

Stromquist_montagne
Ceci est une montagne, et les 4 points sont des alpinistes. Un peu d’imagination.

La descente, pour A et B ne se fait pas n’importe comment : ils font en sorte de toujours être à la même hauteur (et donc, [AB] est toujours parallèle au sol). Même si le relief ne se prête pas à une descente constante (par exemple, A devra remonter une fois au niveau du lac), les deux alpinistes peuvent toujours être à la même hauteur, quitte à ce que l’un d’eux rebrousse momentanément chemin.
C et D font la même chose, mais en partant de la base M du rocher, jusqu’à ce que A rencontre D et B rencontre C.

Mais les 4 alpinistes sont encore plus synchronisés que ça : ils font en sorte que la distance entre A et B soit toujours la même que celle entre C et D. Encore une fois, le terrain demandera sûrement à ce que l’un des deux couples fasse marche arrière pour que l’autre puisse progresser.

Grâce à tous ces efforts, les positions des 4 alpinistes forment en permanence un parallélogramme (où la direction horizontale a été arbitrairement choisie). Entre le moment où les alpinistes commencent leur descente/montée et le moment où ils se croisent, il y aura un instant où la distance entre les deux couples sera la même que la distance entre les deux alpinistes d’une même face. A ce moment très précis, ils formeront un losange. Celui que l’on recherche !

Le problème du carré triangle inscrit

Et pourquoi pas chercher un triangle inscrit ? Équilatéral, par exemple. Un théorème de 1980 nous dit qu’il en existe au moins un, et donne même une recette pour le trouver :

Etape1_etape2

- Étape 1 : On considère un cercle à l’intérieur de la courbe J, et on le déplace jusqu’à ce qu’il entre en contacte avec la courbe en un point A. On considère aussi P et Q, deux points de J dont la distance est la plus grande possible
- Étape 2 : A partir de ce point A, on peut construire un triangle équilatéral ABC inscrit dans le cercle. On dilate le cercle jusqu’à ce que l’un des deux points (B ou C) rentre en contact avec la courbe.

- Étape 3 : Disons que c’est le point B qui touche J en premier (si les deux le touche en même temps, on a trouvé le triangle qu’il fallait). C est donc à l’intérieur de J. En maintenant fixé le point B, on déplace A jusqu’en P, tout en gardant le triangle équilatéral. Si tout va bien, C sortira de J, et donc, croisera la courbe (ce qui donne un triangle ABC équilatéral).
- Étape 4 : Sinon, C est toujours à l’intérieur. Pas grave. On garde cette fois fixe le point A, et on déplace B jusqu’en Q. La distance PQ étant supposée maximale, le point C sortira de J, en le croisant, ce qui donne le triangle cherché.

En fait, cette preuve permet de trouver un triangle similaire à n’importe quel triangle donné. Dans la preuve, il faut cependant veiller à ce que AB soit le plus petit côté du triangle, pour être sûr que le troisième point sorte de la courbe à l’étape 4.

Cette version du théorème du triangle inscrit dit qu’il en existe au moins un, mais une version plus forte (démontrée en 1992) indique qu’il y en a une infinité et que, si on les dessine tous, l’intérieur de la courbe sera complètement colorié. On peut même montrer que le théorème reste vrai (moyennant une petite hypothèse) quand on considère la courbe dans l’espace plutôt que dans le plan. Pour ce qui est des dimensions supérieures, la question reste ouverte…


Sources :
Figures Inscribed in Curves, par Mark J. Nielson : un tour d’horizon encore plus large, avec les définitions et démonstrations un peu plus rigoureuses qui manquent à mon article, et le cas du rectangle inscrit que je n’ai même pas évoqué.

>> Article publié initialement sur Choux romanesco, vache qui rit et intégrales curvilignes, un blog du C@fé des sciences

>> Photo FlickR CC-by jasonferrell

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Restaurer des films en utilisant les maths http://owni.fr/2011/03/09/restaurer-des-films-en-utilisant-les-maths/ http://owni.fr/2011/03/09/restaurer-des-films-en-utilisant-les-maths/#comments Wed, 09 Mar 2011 17:42:11 +0000 Julie Delon et Agnès Desolneux http://owni.fr/?p=34281 Les vieux films présentent de nombreux défauts. L’un d’entre eux est le papillonnage (appelé « flicker » en anglais) qui est visible sous forme de fluctuations importantes de contraste d’une image du film à l’autre. Le but de cet article est de montrer comment les images peuvent se modéliser comme des objets mathématiques, et comment manipuler ces objets de façon à modifier les contrastes et corriger le papillonnage.

Les vieux films présentent de nombreux défauts : des rayures, des taches, mais aussi des défauts de luminosité qui se traduisent par des variations non naturelles de contraste dans le film. Ce sont ces défauts de luminosité qui sont désignés par le terme papillonnage (ou flicker pour reprendre le terme anglais). Ces défauts de contraste peuvent être dus à la fois à la dégradation chimique du support du film (qui crée alors des zones plus sombres ou plus claires lors du visionnage), mais aussi à des problèmes de temps d’exposition variables d’une image à l’autre. Ceci est en particulier vrai pour les films tournés à l’époque où la pellicule était entraînée manuellement.

Ci-dessous, la vidéo un court extrait du film Les Aventures des Pieds Nickelés (Emile Cohl/Eclair, 1917-1918, copyright Marc Sandberg). Dans cet extrait, on se rend bien compte de la présence de papillonnage, qui donne l’impression que le film « clignote ».

Le papillonnage se rencontre également dans des films plus récents, comme dans certaines vidéos de type vidéo-surveillance ou vidéo-amateur. Contrairement à d’autres défauts couramment observés dans les films (rayures, poussières, etc.), le papillonnage ne fait pas apparaître de nouvelles structures dans les images. Sa particularité est donc d’être transparent, voire quasiment « invisible » sur une image isolée. Seul le visionnage des images successives du film permet de se rendre compte de sa présence.

Image extraite du film Les Aventures des Pieds Nickelés (Emile Cohl/Eclair, 1917-1918) copyright Marc Sandberg. Le papillonnage d’un film est un défaut qui ne se voit pas sur une seule image.

Comment les mathématiques peuvent-elles intervenir pour éliminer ce type de défaut ? Tout d’abord, les films sont numérisés, ce qui veut dire que la pellicule est scannée, image par image, et que cette suite d’images numériques est stockée sur un ordinateur. En général, une seconde de film comporte 24 images. Un film d’une heure, une fois scanné, contient donc 86400 images numériques. Une image numérique en « noir et blanc » est modélisée mathématiquement comme une fonction définie sur une grille rectangulaire de carrés (appelés pixels pour la contraction de « picture elements ») et à valeur dans l’ensemble des nombres positifs. La valeur de l’image en un pixel est appelée le niveau de gris de ce pixel. Introduisons quelques notations utiles pour la suite de l’exposé. Si v désigne une image numérique, définie sur une grille de [latex] N \times M [/latex] pixels, pour un pixel [latex](xy)[/latex], la valeur [latex]v(xy)[/latex] est son niveau de gris. Dans ce texte, on considèrera que les niveaux de gris sont des valeurs entières comprises entre [latex]0[/latex] et [latex]L[/latex]. Dans les images que l’on manipule tous les jours (photos numériques), les niveaux de gris prennent généralement des valeurs entières entre [latex]0[/latex] (noir) et [latex]L=255[/latex] (blanc). Des valeurs de [latex]L[/latex] beaucoup plus grandes sont utilisées dans des domaines plus pointus (comme en imagerie satellitaire par exemple).

A gauche, une image numérique qui contient 486 x 324 pixels. A droite, un extrait de l’image, de taille 10 x 10 pixels, avec quelques-uns de ces niveaux de gris indiqués en jaune.

Pour éliminer le papillonnage dans un film, on applique à toutes ses images numérisées des changements de contraste (nous verrons plus loin comment les construire). Dire qu’une image v subit un changement de contraste veut dire qu’elle est transformée en [latex]g(v)[/latex] où [latex]g[/latex] est une fonction croissante : chaque pixel [latex](x,y)[/latex] voit son niveau de gris [latex]v(x,y)[/latex] devenir [latex]g(v(x,y))[/latex]. L’intérêt d’utiliser une fonction g croissante est qu’elle conserve l’ordre des niveaux de gris : si le pixel [latex](x_1,y_1)[/latex] est plus sombre que le pixel [latex](x_2,y_2)[/latex] dans l’image [latex]v[/latex], cette propriété reste vraie dans l’image [latex]g(v)[/latex]. En conséquence, un changement de contraste ne modifie pas le contenu géométrique d’une image, c’est-à-dire qu’on voit la même chose dans l’image avant et après un changement de contraste. Il n’y a pas d’apparitions de nouveaux objets dans l’image.

Comment mesurer le contenu géométrique d’une image ? Ceci peut se faire à l’aide de ce qu’on appelle la carte topographique de l’image. Pour la définir, on commence par regarder les ensembles de niveau supérieur de l’image : on fixe un niveau de gris [latex]n[/latex] et on regarde l’ensemble des pixels ayant leur niveau de gris supérieur ou égal à [latex]n[/latex]. La frontière de cet ensemble s’appelle alors une ligne de niveau. Ceci est illustré sur la figure ci-dessous. Lors d’un changement de contraste, les ensembles de niveau sont préservés dans leur ensemble (un ensemble de niveau n pour v devient un ensemble de niveau [latex]g(n)[/latex] pour [latex]g(v)[/latex]).

A gauche, l’image d’une porte de Sidi Bou Said (Tunisie). Au milieu, la même image ayant subi un changement de contraste. A droite, quelques lignes de niveau de cette image.

Le nom de carte topographique vient de l’analogie avec la géographie, où on peut voir [latex]v(x,y)[/latex] comme la mesure de l’altitude du terrain (niveau au dessus de la mer) au point de coordonnées [latex](x,y)[/latex].

L’image de la porte de Sidi Bou Said (Tunisie), vue comme une carte topographique. Le niveau de gris en chaque point représente l’altitude de ce point.

Avant de s’attaquer à la restauration des films, commençons par étudier le cas de deux images. Etant données deux images, on veut appliquer à chacune un changement de contraste tel que les deux images aient la même distribution de niveaux de gris. On dira alors qu’on a effectué une égalisation de contraste entre les deux images, Pour formaliser tout cela, on commence par définir pour une image [latex]v[/latex] (de taille [latex]N \times M[/latex] pixels), son histogramme de niveaux de gris noté [latex]h[/latex] : c’est une fonction qui mesure le nombre de fois où chaque niveau de gris n apparait dans l’image [latex]v[/latex]. Ce qui peut s’écrire :

[latex]h(n)= \# \{ (x,y) \text{ tel que } v(x,y)=n \},[/latex]

où la notation [latex]\#[/latex] désigne le nombre d’éléments d’un ensemble. On peut ensuite définir l’histogramme cumulé de l’image [latex]v[/latex] par

[latex]H(n)=\# \{ (x,y) \text{ tel que } v(x,y) \leq n \} = h(0)+h(1)+\ldots + h(n).[/latex]

L’histogramme cumulé [latex]H[/latex] est une fonction croissante de [latex]n[/latex]. L’histogramme [latex]h[/latex] peut être reconstruit à partir de l’histogramme cumulé [latex]H[/latex] en remarquant que [latex]h(n) = H(n) – H(n-1)[/latex].

Que devient l’histogramme cumulé d’une image v lorsqu’elle subit un changement de contraste ? Si on applique à [latex]v[/latex] un changement de contraste g, comme expliqué plus haut, alors l’histogramme cumulé de [latex]g(v)[/latex] est [latex]H(g^{-1})[/latex], où [latex]H[/latex] est l’histogramme cumulé de [latex]v[/latex], et où [latex]g^{-1}[/latex] est l’inverse de la fonction croissante [latex]g[/latex] . En effet, pour un niveau de gris [latex]n[/latex] donné, le nombre de pixels [latex](x,y)[/latex] tels que [latex]g(v(x,y))[/latex] est inférieur à [latex]n[/latex] est égal au nombre de pixels [latex](x,y)[/latex] tels que [latex]v(x,y)[/latex] est inférieur à [latex]g^{-1}(n)[/latex], et ce nombre est par définition [latex]H(g^{-1}(n))[/latex].

En conséquence, en choisissant bien le changement de contraste [latex]g[/latex], on peut rapprocher la distribution de niveaux de gris de l’image [latex]v[/latex] de n’importe quelle autre distribution de niveaux de gris. Plus précisément, soit [latex]G[/latex] une fonction discrète strictement croissante sur [latex]\{0,\dots ,L\}[/latex], alors [latex]H(g^{-1})[/latex] est une image dont l’histogramme cumulé est donné par la fonction [latex]H((G^{-1}(H))^{-1})=G[/latex] (c’est la formule du paragraphe précédent avec [latex]g=G^{-1}(H)[/latex]). Nous allons utiliser cette propriété dans ce qui suit pour donner à deux images une distribution de niveaux de gris commune.

En effet, on vient de voir que si on a deux images [latex]v_1[/latex] et [latex]v_2[/latex] d’histogrammes cumulés respectifs [latex]H_1[/latex] et [latex]H_2[/latex], alors pour n’importe quelle fonction [latex]G[/latex] discrète et croissante sur [latex]\{0,\dots ,L\}[/latex], les images [latex]G^{-1}H_1(v_1)[/latex] et [latex]G^{-1}H_2(v_2)[/latex] ont même histogramme cumulé [latex]G[/latex]. On est donc amené à répondre à la question : comment « bien » choisir [latex]G[/latex] ? La réponse à cette question (voir le paragraphe déroulant ci-dessous pour les explications de cette réponse) est qu’il faut prendre [latex]G=H_{1/2}[/latex] , où [latex]H_{1/2}[/latex] est appelée distribution mi-chemin ou midway entre [latex]H_1[/latex] et [latex]H_2[/latex] et est donnée par

[latex]H_{1/2}=\left(\frac{H_1^{-1}+H_2^{-1}}{2}\right)^{-1} .[/latex]

Deux images et leurs histogrammes cumulés respectifs.

Les mêmes images qu’au-dessus après égalisation mi-chemin (midway) et leurs histogrammes cumulés.

Dans la formule ci-dessus, [latex]H_{1/2}[/latex]  est définie comme étant la moyenne harmonique des histogrammes cumulés [latex]H_1[/latex] et [latex]H_2[/latex].

(Pour savoir pourquoi c’est le « bon » choix pour G, cliquez ici)

L’égalisation de contraste expliquée ci-dessus pour deux images peut se généraliser à un plus grand nombre d’images, et permet en particulier de restaurer un vieux film qui papillonne. On note
[latex](u_t)[/latex]t=1,2,…,T le film, c’est-à-dire que chaque [latex]u_t[/latex] est une image numérique, et [latex]T[/latex] est un entier qui désigne le nombre total d’images du film. Pour chaque [latex]t[/latex], on désigne par [latex]H_t[/latex] l’histogramme cumulé de ut. La restauration consiste ici à modifier le contraste de chaque image [latex]u_t[/latex] de façon à lui donner le même contraste moyen que les [latex]r[/latex] images qui la suivent et les [latex]r[/latex] images qui la précèdent dans le film (en prenant par exemple [latex]r=5[/latex]). En d’autres termes, on restaure simplement le film en changeant chaque image [latex]u_t[/latex] en [latex]\widetilde{u}_t[/latex], qui est donnée par

[latex]\widetilde{u}_t (x,y)= \frac{1}{2r+1} \sum_{s=t-r}^{t+r} H_{s}^{-1} ( H_{t} (u_t(x,y))) .[/latex]

Plus [latex]r[/latex] est grand, plus on prend en compte un grand nombre d’images dans le film pour restaurer ut, et plus on élimine les fluctuations dues au papillonnage. En contrepartie, prendre une valeur de [latex]r[/latex] trop grande n’a pas forcément de sens si le film comporte beaucoup de mouvements de caméra ou d’objets qui se déplacent.

Voici pour finir quelques résultats. La première vidéo montre l’effet de cette restauration sur l’extrait du film Les aventures des Pieds Nickelés, avec à gauche le film original et à droite le film corrigé. On voit que l’effet de papillonnage a globalement disparu : les différentes images du film ont maintenant des contrastes similaires.

Ci-dessous un deuxième exemple sur un extrait du court-métrage The Cure, de Charlie Chaplin, 1917.

>> La rédaction d’Images des maths, OWNIsciences ainsi que l’auteur, remercient pour leur relecture attentive, les relecteurs dont le pseudonyme est le suivant : Yoann, tumiac et Anne-Laure Dalibard.

>> Article initialement publié sur Images des maths

>> Photo d’illustration FlickR CC by-nc-nd StudioTempura

Pourquoi est-ce le « bon » choix pour G ?

Pour bien choisir [latex]G[/latex], on veut qu’il vérifie un critère simple, à savoir : si [latex]v_1[/latex] et [latex]v_2[/latex] sont deux images provenant d’une même image u par deux changements de contraste différents [latex]g_1[/latex] et [latex]g_2[/latex] (c’est-à-dire que [latex]v_1=g_1(u)[/latex] et [latex]v_2=g_2(u)[/latex]) alors on veut que G vérifie [latex]G^{-1} \left( H_1(v_1)\right) = G^{-1} \left( H_2(v_2)\right)= \frac{v_1+v_2}{2}[/latex]. Et ceci est satisfait pour [latex]G=H_{1/2}[/latex] où [latex]H_{1/2}[/latex] est défini comme ci-dessus par la moyenne harmonique de [latex]H_1[/latex] et [latex]H_2[/latex].

D’autres choix pour [latex]G[/latex] non seulement ne vérifient pas le critère énoncé ci-dessus mais ont aussi, dans certains cas, l’inconvénient de créer des artefacts. C’est ce qui se passe par exemple si on applique à chaque image un changement de contraste qui amène son histogramme cumulé sur l’histogramme cumulé moyen [latex](H_1+H_2)/2[/latex]. Ceci n’est pas satisfaisant, comme le montre l’exemple ci-dessous.[?]

(a) Image d’un dégradé sombre, avec son histogramme et son histogramme cumulé. (b) Image d’un dégradé clair, avec son histogramme et son histogramme cumulé. (c) Image obtenue si on avait utilisé la moyenne arithmétique pour changer le contraste : on a ici créé une discontinuité dans le dégradé. (d) Image obtenue avec la moyenne harmonique des histogrammes cumulés : le résultat est conforme à ce qu’on attend - c’est un dégradé de niveau de gris « moyen ».

]]> http://owni.fr/2011/03/09/restaurer-des-films-en-utilisant-les-maths/feed/ 2 Visualiser l’économie comme les “quants” http://owni.fr/2010/04/02/visualiser-leconomie-comme-les-quants/ http://owni.fr/2010/04/02/visualiser-leconomie-comme-les-quants/#comments Fri, 02 Apr 2010 15:58:32 +0000 Media Hacker http://owni.fr/?p=11546 Cliquer ici pour voir la vidéo.

“Quants” est le surnom donné aux analystes quantitatifs, qui manipulent au quotidien un nombre important de données dans le domaine des mathématiques financières.

L’une des explications de la crise que traverse l’économie mondiale vient certainement se nicher dans les modèles utilisés par ces professionnels de la finance, dont les compétences vont des mathématiques à la physique en passant par les probabilités.

Un univers étrange, que les néerlandais de onesize se sont attachés à faire vivre dans le cadre d’un documentaire sur les “quants”.

Rien de bien didactique, mais cela donne une vidéo rondement bien réalisée, et comportant beaucoup de bonnes idées de visualisation.

Sur ce, bon week-end à toutes et tous :-)

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