OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Clic, clic, fric http://owni.fr/2012/11/08/clic-clic-fric/ http://owni.fr/2012/11/08/clic-clic-fric/#comments Thu, 08 Nov 2012 10:39:38 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=125462 null

Bonne nouvelle pour les marketeux du web et autres adeptes du SoLoMo en quête du sacro-saint buzz sur le web ! Un nouveau service révolutionnaire vient de sortir, permettant de faire exploser les compteurs de vues des dernières vidéos publiées.

Intitulé Buyral, ce dispositif vend des clics, selon différentes formules : 250 000 à 25 000 000 vues pour des sommes allant de $11,99 à $59,99.

“Marre des vidéos virales qui ne deviennent pas virales ? Avec Buyral, vous aurez des millions de clics à chaque instant !” Le succès d’un Gangnam style, de Call me Maybe ou de Maru à portée de souris ! De quoi ouvrir aussi de nouvelles perspectives à la presse, en quête de modèle stable à l’heure du numérique.

Implantée partout dans le monde, la société multiplie les opportunités d’emploi : de la maternelle aux maisons de retraite, en passant par les laboratoires de recherche et développement, toutes les forces vives sont mobilisées pour cliquer sur le bouton play des vidéos virales de demain.

L’activité du “professional clicking” (“clic professionnel”) est en plein essor et n’est pas près de s’arrêter. “Partout il y a un bouton susceptible de récolter des clics. Ascenseur, distributeurs automatiques, jeux de marteau, explique enthousiaste un porte-parole de Buyral dans une vidéo édifiante :

Cliquer ici pour voir la vidéo.



Bon, vous vous en doutiez, Buyral est évidemment une grosse blague. Mais la vidéo reprend si habilement les codes de communication aujourd’hui répandus – plans léchés, ton mielleux et musique lyrico-cul-cul – qu’elle en devient redoutablement efficace. En guise d’exemple, comparez donc avec la chaise la plus célèbre du monde

Cerise sur le gâteau, viralité sur le plan com’, ce projet sort des cervelles d’une agence de pub, John St., basée au Canada, tout aussi compétente dans le bullshit bingo de la pub en ligne : “social”, “experiential”, “digital”… Qui d’autre pour rendre virale une vidéo proposant de rendre virales des vidéos tout en se moquant de ses propres pratiques ? Inception 2.0.

Contacté par Owni pour en savoir plus sur le projet et en particulier à qui celui-ci peut bien bénéficier, les équipes de Buyral nous ont indiqué être débordées, mais ne manqueront pas de nous répondre “dès qu’une équipe de clics sera disponible”.

Mais il y a fort à parier que cette vidéo ne profite qu’aux auteurs eux-mêmes. La boîte est une habituée de ce genre de coups, qui couplent auto-promo et auto-dérision. Pour mémoire (et pour le plaisir, aussi), le clip promotionnel Catvertising. Bah oui, vous pensiez pas que les vidéos de chats rigolos étaient tournées dans un salon tout de même ?

Cliquer ici pour voir la vidéo.


Photo par Pivic (ccbyncnd)

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L’enfant terrible du DIY http://owni.fr/2012/04/19/lenfant-terrible-du-diy/ http://owni.fr/2012/04/19/lenfant-terrible-du-diy/#comments Thu, 19 Apr 2012 10:26:29 +0000 Anaïs Richardin http://owni.fr/?p=106456

Décidément le bricolage de grand-papa est devenu aussi sexy que le surf, surtout s’il est rebaptisé DIY (Do It Yourself, fais-le toi-même.) En témoigne Caine Monroy, ce jeune Américain de neuf ans devenu une star grâce à ses créations du dimanche filmées dans des vidéos qui ont fait le tour du web.

Passionné de jeux et ingénieux bricoleur, Caine a créé une salle de jeux d’arcade dans le magasin de son père, vendeur en pièces détachées automobile. Utilisant de vieux cartons à la manière de Michel Gondry dans La Science des rêves, ainsi que des jouets dont il ne voulait plus, cet as de la débrouillardise a lancé son petit business l’été dernier.

L’histoire de ce petit garçon peu ordinaire est somme toute banale et pourtant cela a fonctionné. Pourquoi ? Le sujet de la vidéo n’est pas sujet à discussion et ne provoque aucune prise de position. Partager cette vidéo n’est pas une action impliquante pour l’internaute et cela lui donne même le sentiment de participer en partie à l’histoire qui se crée. Une histoire que l’on prend plaisir à se transmettre d’ami en ami comme l’explique Camille Alloing, auteur du blog CaddE-Réputation et spécialiste e-réputation :

Une vidéo qui fonctionne est une vidéo qui raconte une histoire. Une histoire que l’on puisse transmettre à d’autres. C’est d’ailleurs la démarche du réalisateur, il n’écrit pas l’histoire il ne fait que la transmettre.

Mais la vidéo ne s’est pas effectuée avec la même fluidité partout dans le monde. En effet, si ce petit film a fait des émules aux États-Unis, il est passé sous le radar des Français, notamment des journalistes. Une différence de réception dont les causes sont très certainement culturelles, analyse Camille Alloing :

C’est la figure américaine du self-made man, en l’occurrence self-made child qui doit résonner aux États-Unis en terme de culture et de conscience collective .

Une notion de self-made man qui n’est pas profondément ancrée dans la culture française. Pourtant c’est à la sueur de son seul front que Caine a tout mis en œuvre pour faire de son business en carton une véritable petite affaire professionnelle : t-shirt “staff” au nom de son enseigne “Caine’s arcade”, sac en papier étiquetés à la main, tickets de jeu patiemment découpés et collés.

Malheureusement pour lui, le quartier de Los Angeles dans lequel est situé le magasin de son père est une zone industrielle qui n’attire pas les foules. Enfin, qui n’attirait pas les foules jusqu’à ce que Nirvan Mullick, réalisateur, y passe chercher une pièce pour réparer sa vieille Toyota. Intrigué par l’ingéniosité du jeune garçon, il décide de tester cette salle de jeux faite de bric et de broc. Dans la vidéo, il raconte leur rencontre :

Je lui ai demandé combien cela coûtait pour jouer. Pour un dollar, vous avez quatre parties mais pour deux dollars vous avez un fun pass, qui vous permet de jouer 500 fois. J’ai pris le fun pass.

Ce premier –et unique- client était aussi celui qui allait conduire Caine au succès. Impressionné par sa débrouillardise, il décide d’offrir au petit garçon ce qui lui manque : des clients. Nirvan Mullick, stratège digital pour une agence de communication a su mobiliser ses compétences en la matière pour faire connaître Caine’s arcade. Il crée ainsi une page Facebook, un compte Twitter, ainsi qu’un site web. Avec le concours du père de Caine, il organise une flashmob, réunissant en secret une centaine de personnes dans la petite échoppe de Mission road.

Pour Caine ce sera “le plus beau jour de sa vie” et pour Nirvan, l’objet d’un petit film qui retrace cette rencontre et la création de Caine’s arcade. La vidéo de onze minutes, créée pour être visionnée aux DIY days de l’université de Californie UCLA sera ensuite postée sur YouTube et Viméo le 9 avril. Avec plus de deux millions de visiteurs, le succès n’est pas à la hauteur de la vidéo KONY 2012, l’autre démonstration de viralité de l’année qui a attiré 43 millions de visiteurs en seulement deux jours. Mais l’histoire ne s’arrête pas à un joli film qui a fait le tour de la toile.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Souhaitant profiter du buzz pour donner un vrai coup de pouce à Caine, Nirvan Mullick a créé une Fondation pour récolter des fonds et payer les frais universitaires du jeune garçon, généralement très élevés de ce coté de l’Atlantique, ainsi que pour venir en aide à d’autres enfants. Avec un objectif initial de 25 000 dollars, il a finalement récolté 60 000 dollars en une journée. Six jours après le lancement de l’opération, Nirvan vient de remettre à Caine un énorme chèque en carton, que l’on n’espère pas en bois, d’un montant de 152 000 dollars. De quoi permettre à ce petit génie de faire de grandes études qui le mèneront peut-être à devenir milliardaire dans 30 ans comme le présent le magazine économique américain Forbes.

Le DIY tel que l’a utilisé Caine pour créer de ses mains ce dont il avait envie est un mouvement de plus en plus répandu, d’autant plus durant ces périodes où le pouvoir d’achat est en berne. La débrouillardise en est une des clés et ce petit garçon en a motivé plus d’un à faire de même. Le hashtag #teamcaine sur Twitter a ainsi été créé pour ses supporters mais aussi pour que d’autres enfants créatifs puissent partager leurs créations.

À l’heure où l’on parle de plus en plus des bénéfices des jeux vidéo pour affuter certaines capacités comme la réactivité, de nombreux commentaires saluent justement le fait qu’aucun outil numérique n’est ici en jeu. Comme les enfants s’amusaient avec un morceau de bois et une chambre à air au début du siècle, Caine a su créer lui-même son jeu, laissant de côté les écrans et mettant à profit son temps libre pour inventer toujours plus de nouvelles machines à rêve.


Captures d’écrans de la video Caine’s Arcade et via l’album Facebook Caine’s Arcade Flashmob

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http://owni.fr/2012/04/19/lenfant-terrible-du-diy/feed/ 9
Pop, sexe, teen-stars : cocktail gagnant http://owni.fr/2011/03/25/pop-sexe-teen-stars-cocktail-gagnant/ http://owni.fr/2011/03/25/pop-sexe-teen-stars-cocktail-gagnant/#comments Fri, 25 Mar 2011 12:05:01 +0000 Loïc Dumoulin-Richet http://owni.fr/?p=31344

Yesterday was Thursday, today is Friday, tomorrow is Saturday and afterwards comes Sunday

Hier nous étions jeudi, aujourd’hui nous sommes vendredi, demain nous serons samedi et après ça ce sera dimanche. Avouez que la pop est parfois pratique pour se rappeler les bassesses du quotidien. Cette trouvaille littéraire nous vient de la très jeune Rebecca Black, adolescente californienne de 13 ans comme il en existe tant, une jeune fille pas vraiment vilaine mais pas tellement jolie non plus. Sauf que celle qui aurait dû demeurer très loin dans l’ombre des Miley Cyrus, Selena Gomez, Demi Lovato et autres poupées manufacturées par Disney, fait actuellement l’objet d’un buzz aussi démesuré que révélateur d’une fascination malsaine pour les baby stars.

Depuis sa mise en ligne le 10 février dernier, la vidéo (very) low-cost du single Friday, toute en fonds verts et effets Windows Movie Maker, a été vue près de 47 millions de fois. Pour comparaison, Born This Way, le dernier Lady Gaga sorti le lendemain, affiche un peu moins de 25 millions de vues (au 25/3). “Rebecca Black” est un trending topic mondial sur Twitter depuis mi-mars et ne montre aucun signe de fatigue. Pire que cela ? Des gens achètent la chanson ! Friday est en effet 27ème du top iTunes US (au 25 mars, elle était 42ème le 23/3) et devrait logiquement continuer de grimper…

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Si Rebecca Black amuse les réseaux sociaux et donne espoir à des milliers de gamines des banlieues plus ou moins aisées de Californie et d’ailleurs, elle n’est que la partie émergée d’un iceberg de glauque pailleté façonné par Ark Music Factory, une société de production artistique basée à Los Angeles et fondée par Patrice Wilson et Clarence Jey.

Patrice Wilson et Clarence Jey entourant l'une de leurs petites protégées

Quand on regarde d’un peu plus près le fonctionnement de la structure, on s’étonne de constater que le duo de producteurs concentre ses efforts musicaux sur une typologie très spécifique de “clients” : les garçons et filles de 13 à 17 ans, qu’ils attirent grâce à des petites annonces publiées sur des sites dédiés (voir ci-dessous).

Pour une somme que l’on imagine conséquente et acquittée par les parents des apprenties starlettes (on parle de 2000$, chiffre que les intéressés n’ont pas encore commenté), Ark Music Factory offre l’enregistrement d’un titre pop des plus génériques, surchargé d’autotune (ce logiciel qui corrige la voix) pour contourner les “légers” problèmes de fausseté de la plupart des clientes. Une vidéo est également proposée dans le package, outil ultime de viralité, ainsi que l’a prouvé la jurisprudence Rebecca Black et ses 47 millions de vues. Il est bon de noter qu’Ark Music Factory dispose d’un site web qui nous ramène directement en 2001, un véritable délice pour les yeux.

Les constantes observées au sein du catalogue d’Ark Music Factory soulèvent quelques questions quant aux intentions de la structure californienne. Avec un catalogue composé majoritairement de très jeunes filles qu’on jurerait sorties d’un concours de mini-miss et dont on imagine sans peine la mère style cougar défraîchie tapie dans un coin du studio d’enregistrement, Patrice Wilson et Clarence Jey semblent vouloir compléter les efforts de l’oncle Walt Disney dans l’hypersexualisation des (très) jeunes adolescentes (voir le cas Miley Cyrus). Sauf que contrairement aux bluettes made in Disney Channel, les deux angelenos ne font pas dans la demi-mesure et la fausse impudeur. On peut douter que des jeunes filles de 15 ans à peine soient aussi au fait des méandres des relations amoureuses que leurs chansons ne le laissent croire (voir Kaya : Can’t Get You Out Of My Mind). Face aux nombreuses critiques essuyées ces derniers jours, Ark Music Factory a décidé de contre-attaquer et promet “toute la vérité” pour le 25 mars, dans une vidéo à paraître sur son site.

La pop-érotisation n’a rien de neuf, notamment aux Etats-Unis, et l’innocent le dispute souvent au glauque. On pense à JonBenet Ramsay, cette mini miss au destin tragique (elle avait été retrouvée violée et assassinée dans le sous-sol de la maison familiale, et le crime n’a jamais été élucidé), qui en son temps avait cristallisé les critiques envers une Amérique victime de son culte de la célébrité à tout prix. Autre style, destin moins tragique, mais pas moins révélateur : Britney Spears, icône pop depuis la fin des années 90, qui chantait à 16 ans “hit me baby one more time” (“chéri démonte moi encore une fois”) en jupette d’écolière. Cela bien sûr, c’était avant sa révolution sexuelle, effectuée vers 20 ans au son de “I’m a slave for you” (“Je suis ton esclave”). Sur le même modèle,son héritière “spirituelle” Miley Cyrus suit à la lettre les préceptes de son aînée, passant sans transition de Hannah Montana au mini-short en cuir.

Les enfants-stars ne datent pas des années 2000. On se rappelle les premiers pas de Liz Taylor ou de Michael Jackson et ses frères, mais là les choses demeuraient très chastes et le public les a vu grandir au rythme des adolescents lambda, plus ou moins. Le problème posé par l’hyper-sexualisation des nouvelles idoles réside dans la rapidité avec laquelle elles font leur révolution sexuelle, qui constitue leur moyen d’émancipation d’une image idéalisée de petite fille modèle. Dans Hannah Montana, Miley Cyrus joue une adolescente bien sous tous rapports, collégienne le jour et star de la chanson la nuit. Mièvre au possible, la série ne ferait pas de mal à une mouche. Sauf que son héroïne grandit, et doit s’assurer un avenir après elle. Il passe, comme pour toutes les starlettes Disney, par une carrière musicale. Celle-ci permet facilement de rendre son image plus sexy. Sauf que le public (de petites filles) qui suit ces stars évolue, lui selon un schéma bien plus lent. La distance qui se crée alors entre le role-model et ses fans se fait rapidement fossé. Le même schéma s’applique à Britney, Demi, Selena et sans doute beaucoup d’autres à venir.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

(Ci dessus : vidéo de la soirée de présentation des artistes Ark Music Factory)

Le dernier exemple en date ? L’arrivée des enfants de Will Smith sur le devant de la scène. Jaden, le fils de 11 ans tout d’abord, qui embrasse une carrière d’acteur en incarnant le célèbre Karate Kid dans le remake du film éponyme. Outre une large campagne de promotion dans les différents médias et un duo avec Justin Bieber sur la BO du film, le jeune adolescent s’est fendu d’une participation plutôt étonnante à une émission chinoise, au cours de laquelle les présentateurs lui ont demandé d’exhiber ses abdominaux, allant même jusqu’à les compter. Rappelons que Jaden est né en 1998.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La cadette Willow est elle aussi sur le devant de la scène, mais musicale cette fois. Son premier single “Whip My Hair”, est l’un des succès de ces derniers mois (#2 des charts anglais et 270 000 ventes, 11ème du Billboard américain). Moins sexuée que son aînée et ses collègues d’Ark Music Factory, il n’en demeure pas moins que Willow n’a plus grand chose d’une enfant lorsqu’elle est sur scène. Sauf peut-être le physique.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Ce qui frappe le plus dans le phénomène entourant Rebecca Black, c’est la rapidité avec laquelle il s’est développé, bien aidé il faut dire par un mauvais buzz initié sur Twitter et soutenu par la vidéo postée sur YouTube. Le basculement du cercle d’initiés des réseaux sociaux au grand public a surpris les premiers autant qu’il excite le second. Alors que nombre de ces modes éphémères du web se cantonnent aux réseaux sociaux sans guère toucher davantage qu’un petit nombre d’habitués, celui-ci risque de faire de l’adolescente une star bien malgré elle.

Allez, pour finir, une parodie plutôt savoureuse, forcément intitulée “Saturday” !

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Crédits photos : captures d’écran

Article initialement publié sur OWNI.fr
Retrouvez tous les articles du dossier “érotisation des enfants”:
Des soutiens-gorge “ampliformes” en taille… 8 ans
Little Miss Austin

Justin Bieber, star d’un porno ?

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http://owni.fr/2011/03/25/pop-sexe-teen-stars-cocktail-gagnant/feed/ 2
Ados, chansons et hyper-sexualisation http://owni.fr/2011/03/23/ados-chansons-et-hyper-sexualisation/ http://owni.fr/2011/03/23/ados-chansons-et-hyper-sexualisation/#comments Wed, 23 Mar 2011 17:38:55 +0000 Loïc Dumoulin-Richet http://owni.fr/?p=52904

Yesterday was Thursday, today is Friday, tomorrow is Saturday and afterwards comes Sunday

Hier nous étions jeudi, aujourd’hui nous sommes vendredi, demain nous serons samedi et après ça ce sera dimanche. Avouez que la pop est parfois pratique pour se rappeler les bassesses du quotidien. Cette trouvaille littéraire nous vient de la très jeune Rebecca Black, adolescente californienne de 13 ans comme il en existe tant, une jeune fille pas vraiment vilaine mais pas tellement jolie non plus. Sauf que celle qui aurait dû demeurer très loin dans l’ombre des Miley Cyrus, Selena Gomez, Demi Lovato et autres poupées manufacturées par Disney, fait actuellement l’objet d’un buzz aussi démesuré que révélateur d’une fascination malsaine pour les baby stars.

Depuis sa mise en ligne le 10 février dernier, la vidéo (very) low-cost du single Friday, toute en fonds verts et effets Windows Movie Maker, a été vue près de 34 millions de fois. Pour comparaison, Born This Way, le dernier Lady Gaga sorti le lendemain, affiche 23 millions de vues. “Rebecca Black” est un trending topic mondial sur Twitter depuis mi-mars et ne montre aucun signe de fatigue. Pire que cela ? Des gens achètent la chanson ! Friday est en effet 42ème du top iTunes US (au 23 mars) et devrait logiquement continuer de grimper…

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Si Rebecca Black amuse les réseaux sociaux et donne espoir à des milliers de gamines des banlieues plus ou moins aisées de Californie et d’ailleurs, elle n’est que la partie émergée d’un iceberg de glauque pailleté façonné par Ark Music Factory, une société de production artistique basée à Los Angeles et fondée par Patrice Wilson et Clarence Jey.

Patrice Wilson et Clarence Jey entourant l'une de leurs petites protégées

Quand on regarde d’un peu plus près le fonctionnement de la structure, on s’étonne de constater que le duo de producteurs concentre ses efforts musicaux sur une typologie très spécifique de “clients” : les garçons et filles de 13 à 17 ans, qu’ils attirent grâce à des petites annonces publiées sur des sites dédiés (voir ci-dessous).

Pour une somme que l’on imagine conséquente et acquittée par les parents des apprenties starlettes (on parle de 2000$, chiffre que les intéressés n’ont pas encore commenté), Ark Music Factory offre l’enregistrement d’un titre pop des plus génériques, surchargé d’autotune (ce logiciel qui corrige la voix) pour contourner les “légers” problèmes de fausseté de la plupart des clientes. Une vidéo est également proposée dans le package, outil ultime de viralité, ainsi que l’a prouvé la jurisprudence Rebecca Black et ses 34 millions de vues. Il est bon de noter qu’Ark Music Factory dispose d’un site web qui nous ramène directement en 2001, un véritable délice pour les yeux.

Les constantes observées au sein du catalogue d’Ark Music Factory soulèvent quelques questions quant aux intentions de la structure californienne. Avec un catalogue composé majoritairement de très jeunes filles qu’on jurerait sorties d’un concours de mini-miss et dont on imagine sans peine la mère style cougar défraîchie tapie dans un coin du studio d’enregistrement, Patrice Wilson et Clarence Jey semblent vouloir compléter les efforts de l’oncle Walt Disney dans l’hypersexualisation des (très) jeunes adolescentes (voir le cas Miley Cyrus). Sauf que contrairement aux bluettes made in Disney Channel, les deux angelenos ne font pas dans la demi-mesure et la fausse impudeur. On peut douter que des jeunes filles de 15 ans à peine soient aussi au fait des méandres des relations amoureuses que leurs chansons ne le laissent croire (voir Kaya : Can’t Get You Out Of My Mind). Face aux nombreuses critiques essuyées ces derniers jours, Ark Music Factory a décidé de contre-attaquer et promet “toute la vérité” pour le 25 mars, dans une vidéo à paraître sur son site.

La pop-érotisation n’a rien de neuf, notamment aux Etats-Unis, et l’innocent le dispute souvent au glauque. On pense à JonBenet Ramsay, cette mini miss au destin tragique (elle avait été retrouvée violée et assassinée dans le sous-sol de la maison familiale, et le crime n’a jamais été élucidé), qui en son temps avait cristallisé les critiques envers une Amérique victime de son culte de la célébrité à tout prix. Autre style, destin moins tragique, mais pas moins révélateur : Britney Spears, icône pop depuis la fin des années 90, qui chantait à 16 ans “hit me baby one more time” (“chéri démonte moi encore une fois”) en jupette d’écolière. Cela bien sûr, c’était avant sa révolution sexuelle, effectuée vers 20 ans au son de “I’m a slave for you” (“Je suis ton esclave”). Sur le même modèle,son héritière “spirituelle” Miley Cyrus suit à la lettre les préceptes de son aînée, passant sans transition de Hannah Montana au mini-short en cuir.

Les enfants-stars ne datent pas des années 2000. On se rappelle les premiers pas de Liz Taylor ou de Michael Jackson et ses frères, mais là les choses demeuraient très chastes et le public les a vu grandir au rythme des adolescents lambda, plus ou moins. Le problème posé par l’hyper-sexualisation des nouvelles idoles réside dans la rapidité avec laquelle elles font leur révolution sexuelle, qui constitue leur moyen d’émancipation d’une image idéalisée de petite fille modèle. Dans Hannah Montana, Miley Cyrus joue une adolescente bien sous tous rapports, collégienne le jour et star de la chanson la nuit. Mièvre au possible, la série ne ferait pas de mal à une mouche. Sauf que son héroïne grandit, et doit s’assurer un avenir après elle. Il passe, comme pour toutes les starlettes Disney, par une carrière musicale. Celle-ci permet facilement de rendre son image plus sexy. Sauf que le public (de petites filles) qui suit ces stars évolue, lui selon un schéma bien plus lent. La distance qui se crée alors entre le role-model et ses fans se fait rapidement fossé. Le même schéma s’applique à Britney, Demi, Selena et sans doute beaucoup d’autres à venir.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

(Ci dessus : vidéo de la soirée de présentation des artistes Ark Music Factory)

Le dernier exemple en date ? L’arrivée des enfants de Will Smith sur le devant de la scène. Jaden, le fils de 11 ans tout d’abord, qui embrasse une carrière d’acteur en incarnant le célèbre Karate Kid dans le remake du film éponyme. Outre une large campagne de promotion dans les différents médias et un duo avec Justin Bieber sur la BO du film, le jeune adolescent s’est fendu d’une participation plutôt étonnante à une émission chinoise, au cours de laquelle les présentateurs lui ont demandé d’exhiber ses abdominaux, allant même jusqu’à les compter. Rappelons que Jaden est né en 1998.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La cadette Willow est elle aussi sur le devant de la scène, mais musicale cette fois. Son premier single “Whip My Hair”, est l’un des succès de ces derniers mois (#2 des charts anglais et 270 000 ventes, 11ème du Billboard américain). Moins sexuée que son aînée et ses collègues d’Ark Music Factory, il n’en demeure pas moins que Willow n’a plus grand chose d’une enfant lorsqu’elle est sur scène. Sauf peut-être le physique.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Ce qui frappe le plus dans le phénomène entourant Rebecca Black, c’est la rapidité avec laquelle il s’est développé, bien aidé il faut dire par un mauvais buzz initié sur Twitter et soutenu par la vidéo postée sur YouTube. Le basculement du cercle d’initiés des réseaux sociaux au grand public a surpris les premiers autant qu’il excite le second. Alors que nombre de ces modes éphémères du web se cantonnent aux réseaux sociaux sans guère toucher davantage qu’un petit nombre d’habitués, celui-ci risque de faire de l’adolescente une star bien malgré elle.

Allez, pour finir, une parodie plutôt savoureuse, forcément intitulée “Saturday” !

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Crédits photos : captures d’écran

Illustration de la Une : Louison pour Owni
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Des soutiens-gorge “ampliformes” en taille… 8 ans
Little Miss Austin

Justin Bieber, star d’un porno ?

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http://owni.fr/2011/03/23/ados-chansons-et-hyper-sexualisation/feed/ 11
Lady Gaga, The Strokes et la patience de l’internaute http://owni.fr/2011/02/16/lady-gaga-the-strokes-et-la-patience-de-linternaute/ http://owni.fr/2011/02/16/lady-gaga-the-strokes-et-la-patience-de-linternaute/#comments Wed, 16 Feb 2011 09:18:39 +0000 Louis Morales-Chanard http://owni.fr/?p=30330 Louis Morales-Chanard écrit sur le blog Pocket Zeitgeist, où il s’intéresse aux tendances artistiques, sociétales, économiques et technologique.

Il s’est passé quelque chose de bizarre la semaine dernière. Je m’explique :

• Mercredi 9, les Strokes ont sorti Under Cover of Darkness leur premier morceau en cinq ans, sans que rien n’ait filtré jusque là sur Internet, mis à part un extrait de quelques secondes uploadé “par erreur” quelques jours plus tôt. Les blogs musicaux les plus pointus ont salué ce “retour aux formes” et Under Cover of Darkness est toujours #1 du classement Hype Machine. D’après le label français du groupe, le single aurait été téléchargé 80 000 fois au niveau mondial un jour après sa mise en ligne. La France était le quatrième territoire en termes de volume de téléchargement.

• Vendredi 11, Lady Gaga a dévoilé Born This Way, premier single de son prochain album à paraître en mai. De même, aucun extrait n’avait circulé sur Internet, si ce n’est une version a cappella du refrain chantée lors des MTV VMAs, en septembre. En vente en téléchargement légal à partir de 15h, Born This Way est entré en tête des ventes iTunes dans 23 pays. Le titre s’est d’ailleurs écoulé à 60 000 exemplaires en 34 heures au Royaume-Uni, lui permettant de se classer directement numéro trois des charts, alors que le titre est maintenant premier des “midweeks”, le classement intermédiaire publié avant celui du dimanche. Sur le territoire américain, le titre est assuré d’obtenir la première place du Billboard avec près de 450 000 exemplaires écoulés en trois jours. Ces chiffres font de Born This Way le 4ème meilleur démarrage digital de tous les temps (avec bien moins d’une semaine de disponibilité). En France, où le marché digital est bien moins dynamique que chez nos voisins anglo-saxons, le single affichait dimanche soir 11950 ventes (date de cloture du classement de la semaine) et en cumulait 16 000 lundi soir. De quoi en faire un numéro 1, de loin.

Ça ne vous frappe pas? Deux événements musicaux majeurs qui, à deux jours d’intervalle, reposaient sur les mêmes principes de secret et d’attente. Deux événements qui semblent avoir réappris (temporairement) la patience aux twittersphère et blogosphère.

Je me souviens du battage que faisaient encore les radios il n’y a pas si longtemps, lorsque Madonna sortait un nouveau single. Pour American Life (lancé en avril 2003… j’étais en seconde aha), les animateurs d’Europe 2 avaient attendu, fébriles, minuit pile pour diffuser officiellement le morceau! Depuis quelques années, une telle situation est juste inimaginable. Les premiers extraits de disque fuitent plusieurs mois à l’avance pour se retrouver sur tous les bons blogs musicaux, et les albums complets sont téléchargeables en fichier .rar en excellente qualité avant même d’être sur iTunes!

A cet égard, les sorties en parallèle des singles des Strokes et de Lady Gaga apparaissent comme des anachronismes. Comment ces artistes ont-ils pu imposer un embargo sur leur musique? Et surtout, comment Internet, ce gamin turbulent, a-t-il pu jouer le jeu?

De manière intuitive, je dirais tout d’abord qu’il ne s’agit pas de n’importe quels artistes. Inutile de présenter Lady Gaga, apparition pop portée aux nues aussi bien par le grand public que les critiques les plus snobs, en passant par les stylistes et les marketeurs. Inutile, également, de présenter les Strokes, a.k.a «le groupe le plus cool du monde», grâce auquel (ou à cause duquel) nous sommes tous encore en train de porter des slims à ce jour. Ce sont des artistes qui ont un poids culturel rare, ce qui leur permet d’imposer leurs conditions à la communauté musicale en ligne.

Mais il ne suffit pas d’être auréolé de hype pour se faire respecter par les twittos, bien au au contraire. La hype se crée et s’entretient. C’est ce que s’est employé à faire Julian Casablancas sur son compte Twitter en révélant au compte-gouttes des détails sur un album sans cesse repoussé depuis trois ans… tout en prenant soin de brouiller les pistes en postant de fausses pochettes de disque aussi immondes que vraisemblables lorsqu’on connaît le goût des Strokes pour le kitsch (cf. la vraie pochette ci-dessus).

De son côté, Lady Gaga a passé les derniers mois à faire monter la sauce au sujet de son deuxième album, annoncé comme «le meilleur de la décennie» (tranquille). Par ailleurs, “Mother monster” maîtrise parfaitement les rouages du buzz sur Twitter en poussant la création de hashtags à sa gloire ou à celle de son single. Et surtout, elle a pris tout le monde de court en avançant la date de sortie du morceau, qui devait être révélé lors des Grammy Awards, de deux jours. Suffisant pour créer un sentiment d’urgence et exciter un peu plus Twitter et, a fortiori, n’importe quel amateur de pop culture.

On voit donc qu’imposer ses conditions au web n’est pas donné à tout le monde, et qu’il faut savoir s’y prendre… Mais on voit surtout qu’étonnamment, cela reste possible!

J’ai l’impression de me répéter mais c’est un fait : le web a achevé de changer notre rapport aux sources traditionnelles de légitimité. Les artistes, qu’ils soient musiciens, cinéastes, plasticiens, etc. ne maîtrisent plus la diffusion de leurs propres œuvres. Les marques peuvent à tout moment perdre le contrôle de leur image et faire l’objet de lynchages 2.0, comme BP (détournement de pub, de compte Twitter) ou Gap (parodie de logos). Les gouvernements eux-mêmes ne peuvent plus prétendre gérer à 100% leur communication avec la montée en puissance du modèle Wikileaks.

Et pourtant, l’exemple des Strokes et de Lady Gaga montre qu’une source traditionnelle de légitimité peut encore prendre la main sur le web, à condition que cela soit bien fait. De quoi redonner espoir à ceux qui se lamentent de l’effet parfois destructeur (je préfère dire “déconstructeur” mais bon) d’Internet sur la communication, et faire naître quelques craintes chez les tenants du “tout ouvert”. A moins qu’il ne s’agisse d’épiphénomènes, d’exceptions qui confirment la règle…

Qu’en pensez-vous?

PS : Dans le genre “je suis une mégamarque et je sais tenir tête aux réseaux sociaux”, cet exemple est aussi très intéressant.

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http://owni.fr/2011/02/16/lady-gaga-the-strokes-et-la-patience-de-linternaute/feed/ 7
Le transmedia: l’héritage de nos grands-mères au service du marketing http://owni.fr/2010/06/30/le-transmedia-l%e2%80%99heritage-de-nos-grands-meres-au-service-du-marketing/ http://owni.fr/2010/06/30/le-transmedia-l%e2%80%99heritage-de-nos-grands-meres-au-service-du-marketing/#comments Wed, 30 Jun 2010 15:39:17 +0000 Florian Pittion-Rossillon http://owni.fr/?p=20591 Buzz, 360, cross-media, transmedia, storytelling : au secours, on se noie ! Chaque année, un de ces termes inonde les présentations des agences comme les sommaires de la presse et des sites professionnels. A peine a-t-on pris le temps d’en circonscrire le sens et d’en mesurer les implications concrètes grâce à leur traduction en projets rémunérateurs (dont vient toujours la vérité) que l’on passe à la mode suivante.

Coups majestueux et ratages discrets

Rappel historique. En 2005, l’éclair du buzz marketing zèbre le ciel de la communication, déjà bien chargé en nuages. En effet, quelques campagnes bien primées, dont celle de Buzzman pour Quick, signent l’acte de naissance du buzz marketing comme levier business à part entière.

Affolement dans les états-majors de la publicité, qui n’a plus l’apanage de la créativité. Plus tard viendrait le temps de la prise de conscience des agences média et des acteurs du marketing direct, titillés du côté de leur capacité à toucher massivement et/ou directement un consommateur existant ou potentiel.

Lors, les frontières traditionnelles de la communication s’effritent.

S’ensuivent quelques scènes attendues, arrangements sur la partition classique de la querelle des anciens et des modernes, à base de coups majestueux, ratages discrets, et débats type :

  • Les agences web ont-elles le droit de toucher à la stratégie de marque ? (Rôôôô, fait l’assistance médusée)
  • Les agences évènementielles sont-elles capables de penser interactif autrement que dans la rue ? (Rôôôô again)
  • Les agences de publicité sont elles capables de penser des campagnes autrement qu’en mode top-down ? (re)

Les agences média peuvent-elles concilier créativité et couverture ? (last but not least)

Et autres histoires tapissant les couloirs des colloques. A se demander si ce ne sont pas les dirigeants de formations professionnelles qui lancent ces modes sémantiques aussi spectaculaires que leur durée de vie est courte.

Surgi tel un aigle des cimes

Car, en 2010, alors que le 360 s’est transformé en cross-media (après avoir ramassé le brand content en stop le long de l’autoroute de la vidéo en haut débit) ce dernier a à peine le temps d’émerger que déjà le transmedia le piétine ! Aidé en cela par le storytelling, surgi tel un aigle depuis les cimes des spins doctors américains.

Il est arrivé comme une conséquence naturelle que le perfectionnement technique de la mise en scène des messages ait remis sur le devant le suave mastic maintenant tout cela en cohérence: l’histoire. Tous les communicants de la terre, en 2010, promettent à leurs clients qu’ils vont raconter une histoire – le transmedia constituant le versant opérationnel d’une stratégie de storytelling.

Bon.

Exemple 1 : la série « Mes Colocs »

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Un bel exemple de brand content qui a rencontré un tel succès qu’elle sera bientôt diffusée sur NRJ12.
A l’origine de ce programme, réalisé par Riad Sattouf (réalisateur de “Les Beaux gosses”) : la BNP.
Une preuve qu’il est possible de mêler créativité, popularité et marketing.

Les mânes de MacLuhan

La mise en œuvre de différents canaux de communication entraîne le fait que le socle narratif soit mis en scène sous des formes multiples puisque séquencées dans le temps. Une des particularités de ce mode opératoire, qui tangente les mânes de MacLuhan et son adulé/décrié « the medium is the message », est que la mise en scène se fond dans l’histoire (très tarentinien tout ça).

L’écart temporel entre les phases d’activation des différents canaux devient, d’ailleurs, une des lignes-force de ces récits communicationnels d’un nouveau genre. Il est par ailleurs notable que la scénarisation réconcilie l’ensemble des disciplines du marketing, puisqu’une campagne transmedia complète inclut le point de vente, et mobilise donc les leviers du trade marketing.

Oui, s’adresser au consommateur sur le lieu d’achat, de travail, de loisirs, de vacances via des dispositifs out of home est la dernière touche, mais certainement pas la moindre, d’opérations de communication remarquées.

S’adresser au consommateur suppose que sa réponse sera prise en compte

Alors le socle narratif d’une campagne transmedia anticipe la dynamique née de l’interactivité. Autrement dit, le feedback des cibles nourrit l’histoire et devient moteur de la campagne.

Exemple 2 : Artinlight, quand le brand content flirte avec l’art

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La fusion de 3 mondes : L’Hôtellerie de Luxe, le Brand Content, et les Arts.

L’idée est de créer pour chaque hôtel, un synopsis en adéquation avec le lieu pour communiquer d’une manière originale sur … l’établissement : le magazine Photo proposera ainsi un encart dans sa publication pour suivre cette aventure ainsi qu’une photo sélectionnée dans le shooting. Premier happening HD au cœur du mythique Hôtel Amour…

On aime : La tendance Chic, Luxe, Mode très visuelle

L’aïeule impactante

Trop complexe le transmedia ? Trop osé ? Trop cher ? Pas assez ROI ? L’écho des débats constitue-t-il un échappatoire durable à ces questions ?

Bien au contraire ! Le transmedia, c’est rassurant. Car c’est l’art de nos grands-mères remis au goût du jour !

La grand-mère expérimentée, narrant des légendes au coin du feu en sachant en adapter les traits pour mieux doser ses effets. L’aïeule imaginative, ménageant le suspense pour mieux ravir son auditoire toujours captif. L’aïeule impactante, maximisant le ROE (Return On Engagement) de son public conquis et fidélisé pour plusieurs décennies. La surgénitrice, maîtresse du marketing ! Car la grand-mère et le transmedia mettent le monde en récit en s’assurant de l’effet produit.

Le transmedia, démocratie participative du consommateur

Tu comprends, grand-mère, le transmedia c’est rassurant, puisqu’il assure à ceux qui le financent, les annonceurs : cohérence des concepts, optimisation des budgets et de la mise en œuvre opérationnelle. C’est le retour du bon sens dans la communication. En effet, il s’agit ni plus ni moins que de la rationalisation et donc de la mise en cohérence des concepts et des canaux.

Le transmedia ? Le signe que la communication est arrivée à maturité puisqu’elle appelle à elle les techniques balisées du storytelling. Le transmedia, c’est millénaire et ça va encore durer !

Le transmedia, c’est la démocratie participative du consommateur, c’est la pérennité des marques assurée par le passage au tamis de la sagesse des grands-mères !

Allez, ça vaut bien un débat à la machine à café !

[disclaimer] Florian Pittion-Rossillon est associé de BrandCasterz, une entreprise amie hébergée IRL par la soucoupe.

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Nokia: histoire d’un fail corporate http://owni.fr/2010/05/24/nokia-fail-corporate/ http://owni.fr/2010/05/24/nokia-fail-corporate/#comments Mon, 24 May 2010 17:00:55 +0000 Nicolas Kayser-Bril http://owni.fr/?p=16381 Pour faire la promo de son App Store, Ovi, Nokia a lancé un grand jeu en réalité mixée, où les utilisateurs évoluent dans le monde réel et virtuel à la fois. Les finlandais ont non seulement dépensés des millions pour un buzz qui peine à se matérialiser, ils ont également choisi de s’en prendre à une compagnie de vidéosurveillance imaginaire alors même qu’ils se sont fait condamnés par le Parlement Européen pour avoir vendu des technologies de surveillance aux Iraniens.

Décryptage d’un fail corporate dans toute sa splendeur.

1 an de préparation

En embauchant Tim Kring, le créateur de la série Heroes, Nokia a décidé de mettre les bouchées doubles. Plus d’un an s’est écoulé entre l’annonce du lancement (Avril 2009) sous le nom de code TEVA et le démarrage du jeu. Quand on voit la qualité de la vidéo de Blackwell-Briggs, on imagine que les coûts de production se chiffrent en millions d’euros. Le tout est réalisé par TheCompanyP, une boîte suédoise spécialiste des jeux de rôles New Age.

Le scénario était pourtant bien rodé. Une firme imaginaire, Blackwell-Briggs, était censée avoir envoyé un clip vidéo au parlement britannique en mars dernier demandant aux députés de voter une loi sur la vidéosurveillance qui leur aurait permis de vendre une solution de flicage de la population par GPS.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La où Nokia a été très fort, c’est qu’ils ont préparé leur buzz dans les moindres détails. La vidéo a été mise en ligne sur The Pirate Bay le 18 mai à 21h. Du 18 au 22 mai, des marionnettes (sockpuppet) très probablement animées par Nokia sont venues laisser des commentaires du genre ‘OMG, c’est typiquement le style de Blackwell-Briggs!!’. Un faux communiqué a même été envoyé à The Pirate Bay pour exiger de retirer le torrent.

Le site de la firme inventée par Nokia est vraiment chiadé. Les textes sont soignés et les pages ont été faites dans le style corporate-triste qui n’est pas sans rappeler le site de l’entreprise ayant servie de modèle, Blackwater. Ce vendeur de porte-flingues est connu principalement pour avoir buté 17 civils en plein Bagdad en 2007.

Le compte Twitter a également été travaillé. Lancé le 9 avril, les updates avaient l’air presque vraies. La soixantaine de followers, en revanche, provenait presque exclusivement d’Europe du Nord. Bizarre pour une firme américaine. Quand on voit la facilité avec laquelle on peut acheter 10.000 followers, on se dit que TheCompanyP a un peu bâclé le travail.

Le jeu commence lorsqu’une mystérieuse organisation, Conspiracy For Good (le complot du Bien), s’insurge contre Blackwell-Briggs et devient le fer de lance du buzz. L’organisation vous incite à “ne pas en être membre” et à faire le bien autour de vous.

Là encore, Nokia et TheCompanyP arrivent presque à faire illusion. Les données du Whois, qui indique les coordonnées des détenteurs des sites web, ont, elles aussi, été soignées et anonymisées, en utilisant Domain Discreet, une boîte spécialisée dans l’anonymisation de coordonnées Whois, utilisée par les sites pornos ou de jeux en lignes.

Plusieurs profils d’utilisateurs ont été créés afin d’enclencher une dynamique et d’attirer les utilisateurs réels (comme pour chaque lancement de site communautaire). Des personnalités comme Ringo Starr ou Dave Stewart participent également, affirmant qu’elles ne sont pas membres.

J’imagine qu’ils lanceront dans les jours qui viennent une application mobile permettant de jouer depuis son portable. Le post annonçant le ‘protocole Hypatia’, daté du 23 mai, semble le confirmer.

Jusqu’à présent, le buzz n’a pas vraiment fonctionné. Les vidéos de Blackwell-Briggs totalisent moins de 10.000 vues en tout. Surtout, la supercherie a été découverte très rapidement étant donné que les conditions d’utilisation de Conspiracy for Good sont celles de Nokia…

Hypocrisie

Quel besoin de dépenser des millions pour se créer un ennemi imaginaire alors que des dizaines de firmes pourraient très bien servir de cible ? Quel danger pour Nokia à dénoncer Blackwater et ses mercenaires ; Aegis, dont les gros bras s’amusent à tirer sur les voitures civiles en Irak ou encore Securitas, qui tabasse les manifestants au Pérou ?

Les exemples de méchants suffisamment petits pour pouvoir être attaqués sans risques par Nokia ne manquent pas. Tout comme les supermarchés Leclerc font la guerre à l’Insee, Nokia aurait pu utiliser son influence pour mener un combat IRL pour le plus grand plaisir de ses clients.

Le retour du boulet va faire mal à Nokia. Certains vont jusqu’à l’accuser de participer aux guerres qui ensanglantent la région des Grands Lacs depuis des décennies. Les mines de la région extraient en effet un métal, le coltan, largement utilisé pour les produits électroniques, y compris les portables. Les théoriciens du complot imaginent Nokia armant secrètement les milices rwandaises et ougandaises pour nourrir le conflit.

Aucun élément ne vient étayer cette thèse, d’autant plus que Nokia a un intérêt à ce que la paix s’installe durablement dans la région : ça ferait baisser les cours du métal. Par ailleurs, la firme finlandaise participe régulièrement à des programmes de recherches humanitaires, ayant par exemple lancé au Pakistan un programme de détection des pneumonies chez les enfants. On pourrait même aller jusqu’à dire qu’en s’intéressant aux consommateurs les plus pauvres, Nokia a plus fait pour le développement que la plupart des firmes qui ne courtisent que les segments les plus huppés du marché. Utilisées partout dans le monde, les sonneries typiques du Nokia 1200 viendront vous le rappeler.

Sur les murs de Lusaka, Zambie. CC Will Survive

Les communicants de Nokia n’en restent pas moins de beaux hypocrites. Tout comme Blackwell Briggs, l’entreprise a fait beaucoup pour la vidéosurveillance. Pionnière dans l’innovation, elle a commercialisé une caméra de surveillance qui vous envoie des MMS directement sur votre portable. Vous pouvez surveiller votre maison, votre baby-sitter ou votre femme où que vous soyez !

Par ailleurs, vous trouverez sur l’Ovi Store des applications de mouchards qui auraient ravi le KGB. Live2Phone vous propose, moyennant 20 euros, de transformer votre smartphone (où celui de votre époux) en caméra, interrogeable depuis votre ordinateur.

Surtout, les Finlandais se sont illustrés en vendant, avec Siemens, une plateforme de surveillance des télécommunications au gouvernement iranien en 2008. Le monitoring center de la joint venture Nokia-Siemens aurait ainsi aidé le gouvernement de Téhéran à retrouver les manifestants anti-Ahmadinejad.

Photo CC streetart#+_♥.tk www.ALT3.tk

Jean-Marc Manach a réalisé une bonne partie de cette enquête.

Mise à jour 25 mai 11:22 SCADA n’a rien à voir avec le buzz de Nokia. Ce sont les initiales de supervisory control and data acquisition, un processus d’acquisition de données. Désolé.

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Retrouvez les deux autres articles de ce second volet de notre série sur le Contre-espionnage informatique : Petit manuel de contre-espionnage informatique et Comment contourner la cybersurveillance ?

Retrouvez également le premier et dernier volet de cette série sur le contre-espionnage.

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http://owni.fr/2010/05/24/nokia-fail-corporate/feed/ 12
J.J. Abrams est free et il a tout compris ! http://owni.fr/2010/05/08/j-j-abrams-est-free-et-il-a-tout-compris/ http://owni.fr/2010/05/08/j-j-abrams-est-free-et-il-a-tout-compris/#comments Sat, 08 May 2010 16:23:33 +0000 Alexis Hyaumet http://owni.fr/?p=14986 Il y a quelques heures, vient d’être mise en ligne (illégalement) la première bande-annonce d’un film mystère baptisé Super 8. Le projet est entre les mains du réalisateur J.J. Abrams, dont la notoriété est bel et bien confirmée depuis le succès de son Star Trek sorti l’an dernier. Il s’associe aujourd’hui avec Steven Spielberg sur ce film dont ne transpire aucun pitch ou synopsis, sachant que nous avions eu, pour la première fois, vent de ce Super 8 il y a moins de quinze jours.

J.J. Abrams est connu, avant tout, pour ses productions télévisuelles avec des séries à succès comme Alias, Lost ou plus récemment Fringe, mais aussi au cinéma avec la réalisation du troisième Mission: Impossible et du reboot de Star Trek, ainsi qu’à la production du film concept de monstre gigantesque filmé au caméscope DV : Cloverfield.

Ces différentes productions ont fonctionné tout de suite, car Abrams sait créer et entretenir ce que l’on appelle plus communément un buzz (ou un ramdam pour les plus francophiles d’entre nous).

Il provient d’une nouvelle génération de cinéastes américains ayant grandi avec l’Internet et sait comment chercher et captiver l’attention de son public. Dans ses coups de maître, on peut noter une bribe de bande-annonce (comme c’est le cas aujourd’hui pour Super 8) pour Cloverfield présentée avant le premier Transformers, sans que la presse ou autre média ne soient avertis de cette programmation. Seule une ligne de texte dans les instructions de programmation envoyées aux projectionnistes, indiquait la présence d’une bande-annonce précédant le film principal.

Mais le titre, qui allait devenir plus tard Cloverfield, n’apparaissait même pas à la fin de la soi-disant bande-annonce. Seule la date de sortie restait affichée sur l’écran, laissant une vague de spectateurs, aigris mais conquis, déchainer leur frustration sur la toile. Pour Star Trek, des scènes ont été tournées spécialement pour la première bande-annonce – elle aussi diffusée dans les salles sans crier gare.

Le monde s’adapte… surtout sur Internet.

Un mot est passé comme quoi une bande-annonce mystère serait diffusée juste avant Iron Man 2, un projectionniste avait vendu la mèche, sans pour autant savoir de quel film il s’agissait. Il fallut attendre les premiers échos des spectateurs et des screaners (ces vidéos filmant un écran de cinéma avec un caméscope) pour constater qu’il s’agissait bien du projet Super 8, annoncé quelques jours plus tôt. Il faut surtout noter que l’on ne retrouve pas cette traque systématique des vidéos piratées, supprimées avec un acharnement des plus féroces par les majors lésées de leurs copyrights.

Il y a ce choix délibéré de laisser libre court au parcours illégal de cette vidéo et de laisser couler l’encre sur le papier, ou plutôt les posts sur les forums, pour que le buzz s’entretienne de lui-même. Plus besoin de campagnes promotionnelles tapageuses avec des coûts exorbitants !

Avec une culture du secret absolu, entretenue autour de ses projets et leurs tournages, associée à un bon plan com’, J.J. Abrams a su rapidement et sait encore capter son audience avec cette bande-annonce mystérieuse, qui montre plus qu’elle n’explique !

Dans quelques jours, nous aurons le droit à sa mise en ligne officielle  et en haute définition sur le site d’Apple consacré aux bandes-annonces, avec (peut-être) une ligne ou deux nous révélant enfin ce qui se trame derrière tout ce ramdam.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Billet initialement publié sur iGénération(s), un blog de Culture Visuelle

Illustration CC Flickr 917press

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http://owni.fr/2010/05/08/j-j-abrams-est-free-et-il-a-tout-compris/feed/ 1
Facebook, ou le crépuscule des geeks http://owni.fr/2010/03/04/facebook-ou-le-crepuscule-des-geeks/ http://owni.fr/2010/03/04/facebook-ou-le-crepuscule-des-geeks/#comments Thu, 04 Mar 2010 19:24:37 +0000 Alexis MONS http://owni.fr/?p=9427 1717899661_524c54bd72_b

Ces dernières semaines, nous avons assisté à un petit événement lourd de significations. En lançant Buzz, Google a surtout laissé à penser que Wave était un flop et Buzz, un recyclage. Buzz a toutes chances d’être aussi un flop, car ce que cette histoire raconte, c’est celle de la fin de la domination de la geekerie, au sens d’une certaine complexité technologique.
La société de l’information n’est plus l’apanage des geeks. Elle s’est sacrément massifiée. Elle est aujourd’hui peuplée de vrais gens, non-technophiles. Même au sein des blogs, les geeks sont devenus une minorité et l’élite blogueuse geint de l’envahissement du péquin moyen et de ses réactions de comptoir. Il va falloir s’y faire.

Oui, les outils de Google sont fantastiques, ils sont modulables et distribués et complexes. Ils correspondent en fait à un public éclairé, ou à des travailleurs de l’information soucieux de leur productivité. Vous me direz que c’est un marché, et c’est vrai, mais ce n’est pas le marché de masse de l’internaute de base, je devrai dire celui de l’outillage digital de Monsieur tout le monde.

Le gagnant de ce marché s’appelle Facebook. Pourquoi ? non pas parce que Facebook développe un rythme de croissance insolent, non pas par sa taille, mais par la position centrale qu’il a acquis dans les usages numériques.
Monsieur tout le monde cherche sur Google tous les jours, a l’email que lui a mis dans les pattes sont fournisseur d’accès et s’est inscrit (ou va s’inscrire) sur Facebook.

J’ai moi-même régulièrement cogné sur Facebook, raillant le caractère “bas niveau” des usages et son côté bon à tout faire et à ne rien faire. Mais c’est une réaction de professionnel soucieux de productivité, pas de dillétante. Aujourd’hui, je dois constater que c’est une force. Facebook est une commodité et du loisir, et il est simple d’emploi.
Ses conversations ne valent peut-être rien, mais elles existent, massivement. Son modèle conversationnel est en phase avec les usages sociaux qui sont la modernité, là où l’email est vieux, trop sérieux, administratif.

Facebook, c’est aussi de l’engagement, assez faible et avec des usages très encadrés, mais c’est de l’engagement quand même, et de l’engagement massif. Facebook est un réseau social, il devient chaque jour un peu plus une plateforme d’engagement. La professionalisation croissante de ses outils marketing en témoigne. Le retour en scène des applications aussi.

Facebook est mainstream. Et ils ne sont pas légions à prétendre l’être. Apple l’est aussi à travers iTunes. Tous les deux ont la qualité d’être très intégré dans la proposition et en même temps très fermé. Cela fait l’objet d’une critique récurrente, émanant des geeks, sauf que cela semble visiblement satisfaire très bien monsieur tout le monde, qui se fiche des APIs et des paillettes.

Je veux évidemment parler de Facebook Connect, qui est selon moi la grande victoire dont Facebook peut s’enorgueillir et qui lui permet de voir loin.

Quand cette technologie, qui permet notamment de se créer un compte à travers son profil Facebook, est sortie, nous étions à la fois excités et perplexes. Excités par l’opportunité simplificatrice que cela représentait. Perplexe car, à l’époque, il n’était pas du tout certain que les gens acceptent ça, qui plus est alors que venaient de se dérouler des révoltes d’utilisateurs par rapport à de changement des règles du jeu de Facebook.

Quelques deux ans plus tard, force est de constater que ça marche magnifiquement bien. Que chaque jour qui passe montre que cette facilité est transformée par des publics tout sauf geeks. Pendant ce temps, OpenSocial, sorti en même temps, n’affiche pas le même succès.

Twitter et Google répondent très bien à ce que les geeks demandent, mais ils ne réussissent pas à se placer au centre. Facebook a gagné la position du compte maître, celle de la clé par laquelle l’utilisateur lambda développe des services et des usages.

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En fait, Google partait de ce bon vieux principe que la base, c’est l’email. Facebook ne s’est pas construit sur la messagerie, mais sur l’outillage réseau personnel, l’outillage proximité pour être plus précis. C’est maintenant qu’il a une base installée d’utilisateur massive, maintenant qu’il capte presque 10% du trafic du web et presque autant de temps que nous le passions devant le 20h au siècle dernier, chaque jour, qu’il va se doter d’une (vraie) messagerie. Un outil périphérique en fait, certainement pour répondre aux attentes d’une population plus âgée et plus sensible à cet outil ancestral.

Facebook n’a pas la prétention d’imposer de la technologie, il apporte simplement, tant pour l’utilisateur que pour la marque, des outils simples pour travailler l’engagement et la connexion au réseau social. Zuckerberg avait fait son deuil de monétiser le social graph, la proximité personnelle. Il a réussi à en faire un terrain de jeu, il réussira peut-être à en faire un terreau de business. D’autant plus qu’il a enfin une machine rentable.

Sans doute que Facebook réussi dans une sorte de nivellement par le bas. Sans doute que c’est faible, pas bidouillable pour un sou, mais ça satisfait très bien monsieur Toutlemonde et madame Michu, tellement plus nombreux …


> Cet article a été initialement publié sur le blog de groupeReflect / Parole d’expert


> Illustration par kk+ et par libraryman
sur Flickr


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http://owni.fr/2010/03/04/facebook-ou-le-crepuscule-des-geeks/feed/ 160
L’industrie du LOL et ses difficultés à traverser l’Atlantique http://owni.fr/2010/02/20/l%e2%80%99industrie-du-lol-et-ses-difficultes-a-traverser-l%e2%80%99atlantique/ http://owni.fr/2010/02/20/l%e2%80%99industrie-du-lol-et-ses-difficultes-a-traverser-l%e2%80%99atlantique/#comments Sat, 20 Feb 2010 07:30:52 +0000 Vincent Glad http://owni.fr/?p=8623 home_550_170

Dans sa version primitive, le LOL est un acronyme qui marque le rire sur Internet. Pris isolément, il constitue une réponse automatique à un stimulus humoristique (blague -> “lol”). Utilisé à la fin d’une phrase, il marque l’ironie et constitue un palliatif paresseux à une blague bien construite (“ta sœur est bonne lol”). Imperceptiblement, au tournant du siècle, le LOL s’est transformé pour devenir une banale locution de fin de phrase, assez similaire au “quoi”: “y a une redif’ des experts ce soir lol” ou “je t’aime lol”.

Mais ça, vous le savez déjà. Ce qui est beaucoup plus intéressant, c’est l’évolution récente du LOL qui s’est émancipé des bas-fonds de la messagerie instantanée et des forums pour devenir un véritable genre. Aux Etats-Unis, le LOL est devenu une sorte de douzième art, une sous-culture foisonnante peuplée de héros dérisoires aussi appelés “mèmes”: les lolcatsle rick-rollingSarah PalinChristian Bale, le FAIL ou encore le bacon. Pour mieux comprendre le LOL et son importance culturelle, il faut le comparer à une sous-culture française bien connue, ce que l’on a appelé l’”esprit Canal”.

Implanté sur un média jeune et puissant (Canal +), une bande de jeunes (Les Nuls, Les Guignols…) imposait à la France entière ses délires (Régis est un con, “Mangez des pommes”…), qui passaient dans le langage commun et s’imposaient dans les cours de récré et autour des machines à café. Comparons maintenant à l’industrie du LOL américaine: implanté sur un média jeune et puissant (Internet), une bande de jeunes (4chanBuzzfeed…) impose à la terre entière ses délires (lolcats, rick-rolling…) qui passent dans le langage commun et s’imposent sur les blogs, les forums ou Facebook.

Le LOL, des égouts aux bobos

Mais contrairement à Canal + qui fonctionnait selon un modèle vertical (du haut vers le bas, du diffuseur au public), le LOL fonctionne selon un schéma horizontal (tout le monde peut créer un mème, le public est le diffuseur). Résultat: l’industrie du LOL couvre un spectre très large, des bas-fonds du web à la branchitude bobo.

Le LOL naît le plus souvent au fond des égouts, sur le légendaire forum 4chan et plus particulièrement sur le salon /b/, sorte de lie du peuple où s’agrègent contenus porno, blagues de mauvais goût et trouvailles formelles géniales. C’est dans ce lieu de débauche que sont nés les lolcats, chefs d’œuvres de l’ère numérique. Une trouvaille formelle d’une puissance telle que la Bible a fini par être traduite en langage lolcat.

Mais une sous-culture a besoin du soutien des élites pour prospérer, et notamment pour accéder aux médias. Le LOL s’est trouvé une officine branchée et cultivée avec le siteBuzzfeed qui laboure quotidiennement le web à la recherche de LOL déjà pré-digéré. Juste pour situer le niveau, le fondateur du site, Jonah Peretti a également co-fondé le Huffington Post. Quant à la star des contributrices, Peggy Wang, elle est le clavier du groupe de rock indé le plus cool de ce début d’année, The Pains of Being Pure At Heart.

A côté de 4chan et de Buzzfeed, l’industrie du LOL comprend bien sûr une série d’autres sites puissants comme I can haz cheezburgerEncyclopedia DramaticaURLesqueCollege Humor ou Best Week Ever. Sans même compter les LOL sectoriels qui prospèrent sur tous les champs d’intérêt possibles, comme cet étonnant LOLFED, site dédié à la distraction des traders américains.

Et en France, où en est-on?

Ben, on en est très loin, pour tout dire. A part quelques initiatives individuelles comme les articles de Diane Lisarelli sur lesinrocks.com (qui a réussi à imposer une rubrique “LOL”), l’intello Suivez le geek, le jeuniste MonsieurDream, l’égocentrique Henry Michel, le très geek Nioutaik ou encore BienBienBien, la France reste encore assez éloignée du phénomène LOL.

Je vois cinq raisons à cet isolement culturel dans une France pourtant en pointe en terme de démocratisation de l’Internet:

» La France est restée bloquée à l’âge du buzz

Alors que le buzz est un one-shot, le LOL se construit dans la durée. Le buzz, c’est un fait culturel qui se construit uniquement par la puissance du copié-collé: le lien ou la vidéo passe de blogs en blogs, sans aucune modification. Le modèle français du buzz, franchouillard et copié-collard, s’est construit sous l’influence des deux locomotives du genre, Chauffeur de Buzz etMorandini. Il n’a guère évolué depuis son heure de gloire fin 2007 avec les photos de Laure Manaudou à poil et reste aujourd’hui dominant dans le paysage français. Dépassant l’âge du buzz, le LOL utilise lui toutes les ressources de l’ordinateur (Photoshop, montage vidéo, achat de noms de domaine…) pour imposer son modèle de viralité recyclée.

» La France est restée bloquée à l’âge du geek

Rappelons la définition du geek: est geek celui qui n’a pas de copine ou celui qui a une copine mais qui ne parvient pas à lui expliquer ses activités sur Internet. C’est en tout cas la définition française. Aux Etats-Unis, depuis quelques années, cela ne marche plus puisque que le modèle ultime du geek est une fille. La geekette typique, urbaine et branchée, prend en gros les traits d’Amanda Lyn Ferri, inoubliable actrice de la scène d’ouverture du premier lipdub de l’histoire. Ce nouveau public féminin s’est emparée de l’industrie du LOL en développant les lolcats et autres vidéos “cute”, contribuant à démocratiser le phénomène. En France, le geek la joue ancienne école et en revient toujours au bout d’un moment à Star Wars. Ce qui ghettoïse les tentatives du genre, comme sur Suivez le geek ou Nioutaik.

» La France préfère ses LOL à elle

Dans une intention louable de résister à l’envahisseur américain, la France a développé des LOL locaux, comme les Martine ou Vie de merde. Mais ces diverses franchises ne collaborent malheureusement pas entre elles et aucun média n’est capable de les agréger pour définir une ligne commune au LOL français. Assez logiquement, ces tentatives isolées de LOL ne passent pas la frontière et devraient rester des mystères pour les futurs historiens de la culture Web.

» La France est un pays trop revendicatif pour être LOL

Les tentatives françaises de LOL sont souvent réduites à l’inefficacité à cause du vieux fond revendicatif qui traîne dans le cœur de tout Français. En France, le LOL bourgeois s’accompagne toujours d’un anti-hadopisme viscéral qui l’empêche d’atteindre la pureté post-idéologique du lolcat. BienBienBien en est l’exemple parfait. Pendant que l’on tape sur Christine Albanel et Luc Besson, on en oublierait presque de faire des lolcats sur Loic Le Meur.

» Les 4chaneurs français sont prépubères

On a vu avec l’exemple de 4chan que le LOL a besoin d’un forum peuplé de renégats géniaux pour prospérer. En France, à ma connaissance, le seul exemple d’un simili-4chan se trouve dans le forum 15-18 de jeuxvideos.com. Les êtres étranges qui peuplent ce salon ont créé un culte absurde autour du smiley Noël. Ils se font appeler les “noëlistes” et sont capables de lancer des vendettas sur Internet pour défendre leur précieux smiley. Le problème, c’est qu’ils ont entre 13 et 16 ans (toujours enlever deux ans sur les forums Internet) et que leur influence est donc très limitée. Comme nous le signale MasterBuck dans les commentaires, ces bataillons du LOL lâchent vite l’affaire, la maturité venue.

» Article initialement publié sur BienBienBien

» Illustration de Une par See-ming Lee sur Flickr


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